Caen et Mme Le Brethon réhabilite Guillaume le Conquérant
Introduction : D'accord, vous aller dire que j'effectue un méa culpa... Car La Mairie de Caen veut donc honorer plus visiblement le personnage le plus mythique de l'histoire normande : Guillaume le Conquérant au travers du Château Ducal. Je ne peut qu'applaudir. Comme quoi il ne faut jamais trop désespérer, tout le monde peut progresser... LA PREUVE!!! Chapeau pour cette réalisation Mme Le Brethon.
Mais en même temps, il faut préciser également que ce personnage n'appartient pas seulement à CAEN: Marié à EU, mort à ROUEN, se fâchant à BAYEUX, bataillant à DOMFRONT, blessé à BELLEME, tenant concile à LILLEBONNE pour que les barons normands le suivent en Angleterre en 1066. Bref c'est sur tout le territoire normand que mériterait d'être honorer Guillaume le Conquérant. Qui sait que même à Gerberoy en Picardie (mais dans "l'Oise normande"), on trouve même la rue principale du nom de Guillaume le Conquérant et que l'histoire de ce personnage célèbre est enseignée dans les écoles anglaises, comme grand organisateur de l'Angleterre, mais non enseignée dans les écoles françaises et donc de même non enseignée dans les écoles normandes. Allez comprendre...., tel un monde tournant à l'envers....
En plus vous allez voir : on parle dans l'article de "l'image de Caen", mais on ne parle jamais par exemple de "l'image de la Basse" (car inexistante, non appropriable) ou "l'image de la Haute" (car inexistante, non appropriable), ni de "l'image de la Normandie" (mais que prendrait-on : "une image d'Epinal" ou "l'image d'une région en lambeaux" vu tous les efforts d'ignorance...) ... bref....
Voici l'article paru dans le Figaro [NB : D"habitude, je préviens, ne vous fiez pas aux erreurs des journalistes "d'en haut", c'est des bobos (de droite ou gauche? je ne sais..) ne connaissant pas trop "les régions de France" ni la "France tout court", merci de vous montrez compréhensifs envers eux. Mais cet article peu être lu, il est assez bien écrit.] :
Paru dans le Figaro (Rubrique reste du monde & région)
PATRIMOINE D'importants travaux dans le château médiéval vont renouveler l'image de la ville
Caen retrouve son château
Anne-Marie Romero
[23 juillet 2005]
Caen est une ville très paradoxale: c'est un port de mer en pleine terre; son nom évoque d'emblée l'architecture de la reconstruction, au détriment des fleurons de l'art gothique qu'elle recèle; enfin son image culturelle est définitivement liée au Mémorial de la Seconde Guerre mondiale, sans une pensée pour son plus illustre personnage, Guillaume le Conquérant, duc de Normandie et roi d'Angleterre, qui gouvernait depuis l'énorme masse de son château, écrasant la ville et pourtant invisible dès qu'on en a franchi les portes du fait de son immensité même.
C'est pour toutes ces raisons que madame le maire, Brigitte Lebreton, à peine élue, a pris à bras-le-corps un projet qui germait depuis 2000, la rénovation à grande échelle du château qui fut, aux XIe et XIIe siècles, avec ses 5,5 hectares, le plus grand château fort d'Europe, l'agrandissement du musée de Normandie qui en occupe un des bâtiments, le réaménagement de la salle de l'Echiquier – la plus ancienne cour royale anglo-normande – la remise en valeur et la restauration du rempart, enfin, la création d'un nouveau cheminement entre le château et l'université, par la création d'une esplanade de la Paix qui rendra toute sa lisibilité à l'énorme muraille médiévale. Coût de la première tranche de cet ambitieux programme: 16,5 millions d'euros, un budget auquel participent, outre la Ville, le Fonds européen de développement régional, l'Etat, la Région et le département du Calvados. Livraison: fin de l'année.
«Il faut donner une image à Caen, s'enflamme Mme Lebreton. Par habitude, par modestie, nous avons vécu jusqu'à présent sur des images reçues. Nous devons maintenant montrer que, si le Mémorial est essentiel, l'histoire est une chronologie et celle de Caen commence avec le château de Guillaume le Conquérant, qui doit devenir le personnage essentiel de la ville. Notre cité peut très bien avoir une double identité, une identité faite de plusieurs composantes.»
S'il est parfaitement visible depuis la ville basse, le château millénaire de Guillaume disparaît dès qu'on y pénètre pour deux raisons: les murs d'enceinte en ont été écrêtés à plusieurs endroits et le terre-plein central a été rehaussé. Résultat, le visiteur qui y entre ne voit qu'un éparpillement de bâtiments de différentes époques: le donjon, arasé lui aussi, le très beau bâtiment de l'Echiquier, du XIe siècle, le musée de Normandie à l'étroit dans une belle bâtisse du XIVe reconstruite au XVIIe (le logis des Gouverneurs), l'église gothique Saint-Georges, au beau milieu du terrain et le très moderne musée des Beaux-Arts.
La première tâche, en cours, a été de redonner à voir le mur d'enceinte nord-ouest, du XIIe siècle, qui disparaissait sous 6 000 m3 de remblai, montant en pente douce de l'Echiquier jusqu'à une terrasse à canons du XVIe siècle, bâtie en perpendiculaire à la fortification. La terre a été déblayée, mettant à nu l'enceinte et son chemin de ronde et le flanc, intact, de la terrasse à canons, le long duquel grimpe un escalier parfaitement conservé. En belle pierre blanche de Caen, ces éléments d'une splendide architecture militaire, cachés depuis des siècles, sont en cours de restauration et seront enfin visibles.
Le déblaiement de cette masse de terre a inévitablement permis des découvertes archéologiques: une poudrière, deux murs d'une forge du XIVe, datant de la guerre de Cent Ans, et la cave d'une maison privée du XVe ayant conservé une belle cheminée. «Je suis archéologue de formation et je n'ai pas l'habitude de mépriser cette discipline, se défend Jean-Yves Marin, directeur du Musée de Normandie, mais je ne suis pas convaincu de la nécessité de conserver cette demeure qui, ailleurs que dans ce prestigieux château, aurait été détruite sans état d'âme.» Car, une fois n'est pas coutume, c'est la Direction régionale des affaires culturelles qui souhaite la conservation et l'archéologue qui n'en veut pas! Mme Lebreton, plus conciliante, déclare: «Si l'on doit conserver, il faudra trouver une utilisation».
Cet imprévu ne met heureusement pas en péril le grand projet de construire là, en recréant le talus, une extension du musée de Normandie qui montera depuis l'Echiquier et viendra s'arrêter à quelques mètres de la terrasse d'artillerie, laissée visible par une grande baie vitrée. La poudrière et la forge seront conservées, intégrées dans la muséographie de cette nouvelle salle d'exposition de 550 m², dite «du Cavalier», assortie de 650 m² de locaux pédagogiques et de réserves.
Quant à l'enceinte elle-même, qu'on a dû consolider et dont on a débouché les meurtrières fermées au XIXe, lorsque le château servait de casernement, elle sera dotée d'un ascenseur permettant l'accès à un belvédère et à une promenade sur le chemin de ronde. Le visiteur y jouira d'une vue encore inédite sur la ville et sur les restes imposants du donjon et du vieux palais de Guillaume, fouillé après la guerre par Michel de Boüard et dont il ne reste que les traces imposantes au sol.
Le nouveau musée s'enrichira également d'une salle d'exposition permanente consacrée à la Normandie de Guillaume le Conquérant, dans la salle de l'Echiquier dans lequel on créera une mezzanine. On y présentera la Normandie depuis les Vikings, le Moyen Âge normand et l'extension – souvent oubliée – des possessions normandes en Angleterre et en Sicile. Enfin, l'église Saint-Georges, qui servait parfois à des expositions, retrouvera son clocher perdu, en bâtières et en ardoises, et servira de centre d'accueil général du château.
Mais le maire a d'autres projets. Outre le retour d'une école de cavalerie, dans l'enceinte, il veut travailler sur les abords. L'accès au château, côté université, se fait en effet aujourd'hui par un lacis de rues étroites et de ponts surélevés, cachés par de vilaines haies qui coupent totalement la visibilité entre les deux bâtiments. C'est cet emplacement qu'elle souhaite requalifier par la création d'une place, l'esplanade de la Paix. Concédé à un architecte-paysagiste, le cabinet Gestaing-Rousseau, l'espace sera orné de jets d'eau mobiles. Il conservera sa double rangée d'arbres, bordant une seule rue et offrira, depuis l'université, une vue en contre-plongée sur l'enceinte du château débarrassée de ses broussailles.
Quant à Jean-Yves Marin, infatigable chantre des musées, il ne veut pas s'arrêter là. Il envisage, dans une deuxième tranche de travaux, de restituer le palais royal de Guillaume pour y implanter un autre tentacule de son musée trop riche en trésors.
A Suivre...