Par amour pour la Normandie
Michel H. A. Patin
Des souvenirs de son père, enfant lors des bombardements de Lisieux, Élisabeth Dumont-Le Cornec a fait un récit, vivant et plein d'aventures, du 6 Juin et des jours d'après...
Trois questions à...
Élisabeth Dumont-Le Cornec, journaliste et historienne, Parisienne mais Lexovienne de coeur.
Votre père avait dix ans lors du Débarquement en Normandie, que vous en a-t-il raconté pour qu'un jour vous décidiez d'écrire un livre ?
Ce qui est surprenant, c'est que mon père ne m'a jamais vraiment parlé de ce qu'il a vécu. Je savais qu'il avait échappé aux bombardements, mais il en parlait toujours comme s'il avait été spectateur des événements et non pas acteur. Je crois qu'il avait l'impression qu'il n'avait rien d'intéressant à dire, que son avis ne pouvait pas compter. Et c'est seulement parce qu'un jour mes filles lui ont demandé de leur raconter comment était sa vie quand il était petit... pour faire un devoir d'école, que l'idée m'est venue de m'attacher à cette guerre au travers des enfants. De leurs peurs, de leurs bêtises, de leur insouciance au regard des responsabilités de leurs parents.
Après ce premier témoignage, vous en avez collecté d'autres... pour raconter la petite histoire dans la grande Histoire ?
On m'a confié beaucoup de souvenirs. J'ai aussi beaucoup lu de récits écrits par des écrivains publics. J'ai alors construit mon livre autour du témoignage de mon père Marc, qui a vécu les bombardements de Lisieux ; mais aussi de Jacques qui a construit le Mur de l'Atlantique ; de Suzanne qui écoutait Radio Londres avec ses parents et de Monique qui raconte comment on a fait la fête le jour de la Libération... Ensuite, pour répondre aux interrogations de mes enfants sur la vie des GI et de l'extraordinaire exploit qu'a été le Débarquement, j'ai repris des extraits du journal intime d'un soldat que j'ai appelé Matthew et les états de service d'un autre, Johnny, qui raconte, à la première personne, la Bataille de Normandie vue du front.
En quoi, 65 ans après, il est encore important de parler de ces événements aux enfants ?
J'ai été très surprise que cette guerre soit encore aussi vivante dans la mémoire des Normands. J'ai été très étonnée de rencontrer des réticences à me parler en me disant que c'était « trop douloureux et qu'il fallait mieux oublier ». En revanche, les enfants que je rencontre dans mes ateliers d'écriture sont très curieux de ce qu'on vécu leurs grands-parents et arrière-grands-parents. Ils aiment savoir comment était l'école, leur vie sans électricité, leurs jeux... Toutes ces petites choses du quotidien. D'ailleurs, je conseille toujours aux enfants de faire parler leurs grands-parents, c'est une source de grand bonheur et de belles émotions.
Anne BLANCHARD-LAIZÉ.
Ouest-France