AFFAIRE MARITE: SUITE et FIN...

Le Marité va fêter ce week-end à Granville sa première sortie en mer sous voiles...

L'Etoile de Normandie s'en félicite et se réjouit de voir flotter et naviguer ce qui est désormais le fleuron du patrimoine maritime français et... normand car grâce à l'action continue de Franck Martin (maire PRG de Louviers) à la mobilisation de nombreuses collectivités, entreprises et associations normandes, le Marité peut à nouveau voguer au départ d'un port normand.

Néanmoins, vous savez que le collectif citoyen et républicain "Bienvenue en Normandie" avait été alerté sur le fait que l'équipage de marins professionnels du Marité aurait pu être breton faute de trouver en Normandie le personnel compétent.

Nous avons pris nos responsabiltés et organisé une action de sensibilisation le 3 juin dernier, bien en avance avec ce week-end de réjouissance autour de ce beau bateau, le temps d'une polémique et d'une mise au point nécessaire...

La presse (La Manche Libre) que nous avions alerté a fait son enquête: parmi les cinq membres permanents d'équipage trois seront Normands...

Mais cette affaire a fait quelques remous que nous estimons nécessaires afin que certains responsables élus, notamment du côté du département de la Manche, comprennent qu'une opinion normande et vigilante existe désormais: or Monsieur Franck Martin, le président du GIP Marité, a réagi vivement à notre action alors qu'il n'était pas lui même mis en cause, bien au contraire, dans le tract que nous avions distribué le 3 juin dernier, tract  qui avait pourtant pris soin de préciser que notre action n'était en rien une manifestation de "chauvinisme normand"...

Aussi, en toute transparence, nous mettons ci-après en ligne la réponse que nous avons reçue de Franck MARTIN et celle que nous lui avons retournée au titre du collectif citoyen et républicain "Bienvenue en Normandie"

Nous souhaitons rendre public cet échange car il est éclairant quant aux valeurs que nous souhaitons défendre lorsque nous défendons la Normandie.

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La réponse de Franck MARTIN président du GIP (23 juin 2012, réponse à notre mail du 4 juin 2012)

Bonjour,

J'aurais préféré me taire après avoir couvert d'un voile d'oubli cette sinistre histoire, mais vous m'obligez à sortir du silence et vous dire votre fait.

Depuis plus de dix ans maintenant, avec une patience qui frise l'obstination, j'essaie de sauver le Marité pour en faire l'ambassadeur de la Normandie. Dix ans de combat contre la mesquinerie, l'avarice et la bêtise « au front de taureau » comme disait Beaudelaire. 

Votre tract est le dernier avatar de l'éternelle renaissance de ces affreux adversaires, contre lesquels, au fond, je ne peux rien. Il donne raison aux adversaires de la réunification en caricaturant grossièrement notre cause. Je me bats pour la Normandie réunifiée, pour l'égalité de traitement des régions françaises et non pour le slogan fasciste : la Normandie aux Normands.

Même le Front National n'ose plus exiger qu'un emploi soit pourvu en fonction du lieu de naissance. Nous recrutons chaque marin comme tout travailleur doit l'être : en toute objectivité, sans tenir compte de sa couleur de peau, religion, lieu de naissance, ou de l'appui d'un groupe politique. Les seuls critères de recrutement qu'acceptent les principes des droits de l'homme sont la compétence et la disponibilité. La seule discrimination acceptable doit être positive, au nom de l'égalité homme-femme par exemple.

Actuellement, le Marité est géré par une structure purement normande et les entreprises qui l'ont rénové sont toutes normandes. 

Mais si demain, un appel d'offre donnait lieu à délégation de service public à une société privée, j'assumerai clairement le fait que la loi, tant européenne que française, interdit formellement, au nom de l'équité, de retenir une société par discrimination géographique. 

Le combat pour la Normandie est une noble cause. Je regrette que vos écrits risquent de la déshonorer, en laissant croire qu'elle puisse se confondre avec l'injustice et la discrimination.


Bien à vous
Franck Martin

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 La réponse que nous avons envoyée à M. Franck MARTIN au titre du collectif citoyen et républicain "Bienvenue en Normandie" (27 juin 2012)

Monsieur,

Nous sommes très surpris et en même temps attristés de voir votre interprétation du tract qui a été diffusé par notre collectif citoyen et républicain « Bienvenue en Normandie », sur le port de Granville le 3 juin dernier.

Tout d’abord, croyant en la qualité de la relation de confiance que nous avions pu nouer grâce à nos convictions partagées sur la question normande, le 22 mai dernier, dès que j’ai pris connaissance des faits, je vous avais alerté par mail : vous n’avez pas daigné répondre.

Avant de faire notre action le 3 juin (pour ne surtout pas avoir à créer cette polémique le jour prévu pour la première sortie sous voile du Marité), faute d’une réponse et d’une mise au point de votre part en tant que président du GIP, nous avons demandé à La Manche Libre de faire son travail d’enquête : en apprenant par la suite dans la presse que parmi les cinq professionnels recrutés il y avait, bien entendu, des Normands, nous n’aurions pas agi ainsi.

 Ensuite, sachez que la personne qui a nous avait alertés est un militant du front de gauche, acteur de la vie culturelle granvillaise qui s’inquiétait légitimement suite aux propos de Laurent Macé (« recrutement breton en l’absence de marins compétents en Normandie ») tenus devant des professionnels N.U.C. de Granville : ces derniers s’interrogeaient sur la possibilité de faire naviguer des professionnels granvillais à bord du Marité.

Relisez donc notre tract et mon mail du 22 mai et dites moi en quoi ils sont « fascistes ».

Qu’y aurait-il de mal à privilégier la ressource humaine locale pour faciliter l’appropriation par les citoyens de Granville de ce magnifique patrimoine que vous avez effectivement toujours courageusement défendu ?

Vous devez le savoir : Il y a un contexte particulier à Granville et plus généralement dans le Sud-Manche dès qu’il s’agit de la Bretagne et des Bretons qui se traduit ici par un complexe d’infériorité et une peur d’affirmer une identité normande propre aux territoires qui subissent leur géographie. (ex : fuite des jeunes diplômés à Rennes; la liaison ferroviaire Caen-Rennes; la future ligne THT ; le rétablissement du caractère maritime du Mont St Michel; etc...)

Le courrier des lecteurs de La Manche Libre s’en fait d’ailleurs régulièrement l’écho et notre collectif citoyen et républicain « Bienvenue en Normandie » a été créé en 2006 au départ pour traiter cette question quand nous avions découvert que le Conseil Général de la Manche finançait une promotion de la Bretagne  sur l’A84  sans aucune contrepartie.

D’ailleurs, loin de vouloir mettre en cause votre action pour sauver le Marité, notre tract qui mettait aussi en garde contre tout chauvinisme normand tout en proposant quelques idées pour un projet partagé dans le respect de la tradition de solidarité du « Grand Métier »  ( Le Marité navire comité d’une « transat en solidaire » vers Terre Neuve), avait surtout pour but d’interpeller le Conseil Général de la Manche à la lumière de notre expérience :

Il faut cesser d’être naïf ou lénifiant ! Il y a bel et bien un dynamisme de l’identité bretonne qui ne s’embarrasse pas de nos pudeurs pour pratiquer sans complexe cette préférence régionale, que vous avez raison de dénoncer, dès qu’il s’agit de valoriser ou de défendre les intérêts bretons.

Vous pourriez nous objecter : « nous les Normands, on n’est pas obligé de faire pareil ! » et nous dirions exactement la même chose car c’est tout à l’honneur du régionalisme normand de ne pas avoir de sang sur les mains…

Mais face à ceux qui doutent de l’idée même qu’il puisse y avoir une identité ou une unité normande (notamment certains responsables politiques que vous connaissez hélas trop bien !) nous devons vous avouer notre profonde lassitude, pour ne pas dire plus, de devoir toujours justifier la légitimité de défendre les intérêts et l’identité de notre région ! Il y a encore un vrai complexe normand à ce sujet au contraire du « à l’aise Breizh » qui fleurit systématiquement sur les automobiles d’outre Couesnon.

Et nous constatons souvent que ce sont des « horsains », établis depuis peu dans notre région, qui sont les plus ardents défenseurs d’une Normandie toujours plus évidente vue de l’extérieur : face à la passivité, au défaitisme et à la résignation des populations normandes vivant dans un espace vécu régional brisé depuis 40 ans, c’est pour nous une grande consolation qui nous permet de méditer cette phrase du philosophe Gilles Deleuze : « un territoire ne vaut que s’il est quitté ».

 C’est là d'ailleurs mon expérience personnelle ainsi que celle de la plupart de ceux et celles qui forment notre collectif « Bienvenue en Normandie » : des Normand(e)s résidant à l’étranger ou dans d’autres régions françaises, des Normand(e)s revenus en Normandie, et surtout des Normand(e)s de cœur venus d’ailleurs… Et dans le séminaire « Normandie », que nous animons depuis plus de trois ans à l’Université Populaire de Caen avec le soutien de Michel Onfray, nous présentons et nous questionnons une Normandie des possibles et des projets à partir des réalités géo-historiques ou géo-politiques, économiques et sociales : la forme des casques Vikings ne nous intéresse pas !

 Mais la Normandie institutionnelle dont vous faites, malgré tout, partie et qui ronronne doucement depuis 40 ans autour de la question régionale doit désormais s’y faire : une opinion publique normande émerge au moment même où de grands enjeux décisifs pour l’avenir  de notre région (LNPN ; Axe Seine…) exigent une mobilisation et un rassemblement de la conscience normande : pour justifier ces grands projets et leurs dépenses, le moment est venu de présenter un projet normand et de valoriser, sans complexe, l’identité normande ! Et  par l'action que vous menez au CRHN, vous le savez plus que nous encore : il y a urgence !

En prenant le temps de vous répondre franchement sur le fond (car votre engagement pour la Normandie et le Marité mérite tout notre respect et toute notre considération), je pense aussi très fortement à cet ancien marin fécampois, retraité de l’armement Duhamel, que nous avons rencontré à l’occasion de notre action du 3 juin dernier  et qui  nous a rappelé, avec plus de véhémence encore, dans quelles conditions le Marité avait été exploité sous la responsabilité de M. Escoffier: était-il fasciste lui aussi ? 

Nous sommes bien sincèrement navrés de la tournure prise par cette affaire mais j’assume avec les membres du collectif « Bienvenue en Normandie » un rôle de vigilance normande indispensable au réveil d’une conscience régionale au risque, il est vrai, de créer des polémiques s’il n’est, hélas, pas possible de faire autrement.

Aussi, concernant notre combat pour la réunification de la Normandie, nous n’avons pas de leçon à recevoir mais soyez assuré, Monsieur, que nous souhaitons surtout travailler en bonne intelligence et en confiance avec tous ceux qui défendent, comme vous avec valeur et honneur, la Normandie en tant que bien public partagé par tous ses habitants quelle que soit leur origine. Soyez raisonnable M. Martin ! Nous ne sommes pas « fascistes », n’ayez donc pas un raisonnement stalinien car cela ne vous va pas non plus.

Bien à vous

Philippe Cléris 

(petit-fils d'une républicaine espagnole réfugiée dans le bocage flérien en 1934)

P/o le collectif citoyen et républicain 

« Bienvenue en Normandie » (sur cette action: Isabelle Polonio; Dominique Brichard; Jean-Philippe Joly; Claude Rayon)

Comments

[Patrick Robert]

Il est indiscutable que Franck Martin a joué un rôle remarquable dans la rénovation de ce navire.

Pour autant, il importe de souligner que ce sont les contribuables de la Communauté d'Agglomération Seine Eure (Louviers) dont Franck Martin est le président et le fondateur depuis des lustres qui ont mis la main à la poche tant ils ont assuré le financement sous forme de "contributions volontaires" et autres subventions dont la justification locale n'était guère évidente.

La passion du maire (par ailleurs éditeur d'une maison de livres sur la marine)...pour la mer est telle que Louviers est probablement la ville de France continentale qui possède le plus de navires avec le Marité et les Yoles de la CASE.

Dès lors, il nous semble que la moindre des "élégances" eût été d'inviter les contribuables de la CASE à l'inauguration de leur bateau.

Mais c'est loin Granville.