La Ligne à grande vitesse jusqu'à Brest ou Quimper ? Pas avant 2030. L'autoroute 831 entre Fontenay-le-Comte et Rochefort ? Aux oubliettes. Tout comme l'électrification de la ligne ferroviaire Nantes-Tours-Lyon.

80 projets au départ, 9 à l'arrivée (20 si l'on décide de grossir l'enveloppe). La commission présidée par Philippe Duron a dû tailler à la tronçonneuse. Avec un critère : éliminer en priorité les chantiers trop coûteux par rapport à leur utilité.

Une quinzaine de projets passent ainsi à la trappe. Les autres sont classés en trois catégories : « première priorité » qui devraient voir le jour avant 2030, « seconde priorité » qui devront attendre entre 2030 et 2050 et « horizon plus lointain », remis aux calendes grecques.

Pour l'Ouest, sont considérés comme prioritaires : le désengorgement ferroviaire à l'ouest de Paris, en direction de la Normandie et le « secteur ferroviaire » de Rennes.
 


« Il y avait urgence à mettre de l'ordre »

Point de vue par Jean-Marc Ayrault Premier ministre.

« Mon gouvernement avait hérité de l'équipe précédente un vaste plan de projets d'infrastructures nouvelles de transport : 245 milliards d'euros de projets non financés, sans aucun ordre de priorité, conçus sans même qu'ait été regardé l'état réel des infrastructures existantes. Il y avait urgence à mettre de l'ordre dans cet inventaire, à définir un projet ambitieux, réaliste et cohérent. C'est à cela que s'est attelée la commission Duron qui rend aujourd'hui son rapport.

« Ne soyons pas polarisés sur les seules lignes TGV »

En tant que Premier ministre, je voudrais m'adresser à tous les territoires pour leur faire part de mon diagnostic, de mon ambition, et de ma méthode en matière de transport.

Mon diagnostic, c'est que la focalisation exclusive sur les grands projets masque les vrais enjeux des transports, qui sont les transports au quotidien sur lesquels le potentiel d'amélioration est énorme. Je veux une France où les gens auront les moyens de transport pour aller au travail, à l'école, à l'université, où les entreprises disposeront des moyens d'accès et de transport pour se développer, et être compétitives. Une France où chacun disposera d'une mobilité durable, pour produire, pour se former, se détendre, innover, pour se cultiver ou encore pour se soigner.

Mon ambition est celle d'investissements pensés au service de transports efficaces : créateurs de croissance, créateurs d'interactions, et non simplement emblématiques. Par exemple, ne soyons pas polarisés sur les seules lignes à grande vitesse lorsque des trains circulant à 200 km/h à un coût moindre pour les voyageurs peuvent rendre un service économique et social supérieur. Je veux des transports sobres, pensés à chaque fois au sein de leur territoire, et accessibles en termes de coût pour les utilisateurs.

Sur ces principes, ma méthode c'est le contrat, c'est la négociation avec les élus des territoires. Le sérieux budgétaire n'est pas la fin de l'investissement : je veux au contraire qu'il soit l'occasion de rompre avec le réflexe d'un plan qui vient d'en haut, au profit d'une vision fine et concrète. Soyons créatifs. Le 9 juillet prochain, je rendrai public le plan d'investissement du gouvernement. Il concernera les transports, mais également tous les autres aspects de la préparation de l'avenir. Il sera l'occasion de présenter une doctrine d'investissement qui privilégie l'efficacité sur l'affichage, au service de tous les territoires. »

NDLR. Titre et intertitre sont de la rédaction de Ouest-France.

 


« Tout le monde n'aura pas le TGV »

Entretien avec Philippe Duron. Député-maire PS de Caen, président de la commission « Mobilité 21 ».

Quel est votre constat sur le ferroviaire ?

Le système français, de bonne qualité, est en danger. Le réseau connaît un triple problème de maintenance, de rénovation et de modernisation du réseau. Les TGV sont en retard aux heures de pointe. Les grandes gares sont saturées. À quoi cela sert de mettre des milliards pour ne pas arriver à l'heure ? Aujourd'hui, la problématique n'est plus la grande vitesse. C'est d'assurer le transport de tous, dans de bonnes conditions, sur tous les territoires. Pour cela, il nous faut modifier la gouvernance de la politique des transports en France.

Vos préconisations ?

Tout le monde n'aura pas le TGV. Et il nous faut d'abord renforcer l'efficacité du système. En nous calant sur le schéma européen des transports, nous proposons trois calendriers : avant 2030, entre 2050 et après 2050. Avant 2030, deux scénarios A et B sont établis. Cela si l'Agence de financement des transports, l'Afit obtient - ou non - des financements plus ambitieux. Si oui, cela permettrait de passer les investissements de l'Afit de 800 millions à 1,3 milliard par an. Dans tous les cas de figure, le désengorgement du Mantois sur la ligne Paris-Normandie, est acté. C'est une bonne nouvelle pour les Normands.

Quelles autres réalisations avant 2030 ?

La nouvelle ligne LGV Bordeaux-Toulouse est prévue. Quatre nouvelles lignes LGV, vers Rennes, Strasbourg, Bordeaux et Nîmes-Montpellier sont en construction. Cela sera désormais impossible. Il nous faut trouver un équilibre entre ces lignes très onéreuses - sans parler du coût des redevances à Réseau ferré de France - et le quotidien de nombreux voyageurs qui passent par les trains régionaux.

Rien pour les Bretons avant 2030 ?

Les Bretons comme les Aquitains sont bénéficiaires de lignes en construction. La ligne nouvelle va rapprocher l'ensemble de la Bretagne de Paris. Certes, nous avons eu une demande forte des Bretons mais le projet d'un TGV à l'ouest de Rennes n'est pas prioritaire. Chacun défend son territoire, c'est bien normal. Il va me falloir le meilleur gilet pare-balles de la République ! Mais, je note que personne ne remet en cause le sérieux de la commission.