Enfin, Polichinelle révèle ce qu'il sait! La commission parlementaire "Mobilités 21" présidée par le député-maire socialiste de Caen Philippe DURON, par ailleurs président de l'Association de financement des infrastructures de transport de France (AFITF), a remis ce jour au Premier ministre son rapport très attendu sur l'avenir des infrastructures de transports en France d'ici 2030. Le rapport doit éclairer le gouvernement qui rendra définitivement ses arbitrages d'ici le 9 juillet prochain en confirmant les choix drastiques proposés par la commission Duron parmi les grands projets d'infrastructures proposés pour un montant total de 245 milliards d'euros: vu l'état des finances publiques il fallait faire des choix douloureux...
Aussi, sur l'Etoile de Normandie où nous suivons de dossier de très près depuis le début, nous n'avons pas été surpris de voir confirmer le secret de Polichinelle: la France doit inventer un nouveau modèle ferroviaire. La grande vitesse ne doit plus être une finalité en soi. Il faut inventer la grande vitesse de proximité autour du créneau 200 / 250km/h pour des transports en commun moins coûteux, plus efficaces et plus sobres au niveau environnemental. C'était précisément ce pourquoi le projet de Ligne Nouvelle Paris Normandie avait été engagé!
D'où les confirmations suivantes:
1) La hiérarchisation des projets dont nous avons déjà ici parlé avec deux scénarios offrant quelques variantes:
"PREMIERES PRIORITES": projets prioritaires en cours de réalisation à finir d'ici 10 à 15 ans (d'ici 2020) par exemple: la LGV Paris- Rennes en 1h30. Pour la Normandie et le port du Havre: l'achèvement des travaux en cours d'électrification et de modernisation de la future ligne de fret Serqueux- Gisors et le traitement de la section Gare Saint Lazare- Mantes (LNPN phase 1)
"SECONDES PRIORITES": projets prioritaires avec études en cours et à réaliser d'ici 20 ans ( après 2020 - 2030): les autres phases de la LNPN dans sa globalité.
A noter que dans le scénario 1 la gare de Rouen est classée en "première priorité" et que dans le scénario 2 la gare de Rouen glisse en "seconde priorité"...
Mais soyons clair: la LNPN version rapport Duron n'a plus grand chose à voir avec la LNPN sortie du débat public de l'hiver 2011/2012. Le projet "sauvé du rabot" par la commission Duron est celui qui correspond à la note de cadrage de Réseau Ferré de France en date du 25 avril dernier: un projet bien plus modeste que ceux proposés par les scénarios A, B, C ou A-B lors du débat public...
A noter aussi: la réalisation du barreau routier manquant à 2X2 voies entre Nonancourt, Dreux et Allaines pour compléter la rocade Rouen- Orléans de contournement Ouest de la région parisienne (c'est la "route du blé" qui dessert le port de Rouen, premier port européen exportateur de céréales...)
"HORIZONS LOINTAINS": projets non prioritaires à étudier pour une réalisation au delà de 2030: en clair, les calendes grecques. Dans cette catégorie, on trouvera tous les projets de LGV / TGV bretons d'où la colère bretonne qui roule dans les pages de Ouest-France et ailleurs
2) le désenclavement logistique des Grands Ports Maritimes ne semble pas prioritaire:
L'inscription du Serqueux- Gisors ou le maintien du canal Seine-Nord ne suffisent pas à masquer que la France n'a toujours pas l'envie d'une politique d'infrastructures pour développer son potentiel maritime: pour la SNCF, c'est clair, le fret ferroviaire n'est pas une priorité et on peut craindre que tout l'effort soit reporté sur le faramineux projet de ligne fret Lyon- Turin (26 milliards d'euros) qui est loin de démontrer sa pertinence économique puisque les corridors frets alpins ne sont pas Ouest- Est mais plutôt Nord- Sud. Le désenclavement de l'Axe Seine et son prolongement vers le Nord et vers l'Est, au delà de la région parisienne, aurait été beaucoup plus pertinent!
3) Malgré le coup de rabot, quelques marges de manoeuvre:
Philippe Duron, en tant que président de l'AFIT a laissé, néanmoins, entendre que des moyens financiers complémentaires à ceux de l'Etat et des collectivités territoriales, pourraient modifier la hiérarchisation proposée par le rapport ou le phasage des travaux des projets qui ont été sauvegardés: cette question sera essentielle pour l'organisation du chantier de la LNPN. Le Y normand (débranchement vers Rouen-Le Havre et vers Caen-Cherbourg) et la solution ferroviaire rouennaise doivent impérativement opérationnels d'ici 2030 mais surtout pas après!
Le 12 juillet 2013, dans les locaux de la CCI de Caen, à l'invitation de l'association de promotion de la LNPN, Philippe DURON sera invité à s'expliquer sur le fonctionnement et les choix de la commission "Mobilités 21"...
Au titre du collectif citoyen et républicain "Bienvenue en Normandie", nous lui poserons donc les trois questions suivantes:
- Comment rendre compatibles dans l'Ouest parisien les projets de LNPN et de prolongation Ouest du RER E (Eole)?
- En quoi la Normandie pourrait-elle candidater à être territoire expérimental pour les nouveaux matériels ferroviaires développés par Alsthom pour "la grande vitesse de proximité" (250km/h)?
- Puisque l'AFITF doit participer au financement, comment financer l'AFITF? En clair: la société d'autoroute Paris-Normandie doit participer au financement de la LNPN de même que le produit de la future écotaxe transport doit en partie contribuer au financement du projet...
En attendant, Philippe DURON va devoir, en effet, sortir avec "le meilleur gilet pare-balles de la République" et affronter le mécontement de tous ses collègues barons socialistes des territoires dont les projets ont été relégués en catégorie 3, à commencer par les Bretons...
Et quand les Bretons hurlent contre les Normands, c'est peut-être finalement bon signe: les décideurs normands seraient-ils enfin en train de se réveiller?
Lire ci-après, un état de l'ambiance politique autour du rapport Duron sur le site du Moniteur:
http://www.lemoniteur.fr/147-transport-et-infrastructures/article/actualite/21586691-tensions-politiques-autour-du-rapport-duron
Tensions politiques autour du rapport Duron
| 25/06/2013 | 12:57
Le rapport de la commission Mobilité 21 sur les infrastructures de transport à bâtir lors des prochaines décennies doit être rendu public le 27 juin, mais s’attire déjà les foudres des élus régionaux, qui craignent que la rigueur justifie le report des lignes à grande vitesse (LGV).
Les travaux de la commission, dirigée par le député PS du Calvados Philippe Duron, devaient établir des priorités parmi les 70 projets du Schéma national des infrastructures de transports (Snit), établi sous le gouvernement Fillon.
Après huit mois de travail, le rapport privilégie la desserte de proximité par rapport à la grande vitesse. Dans le meilleur scénario, seule la construction de la LGV Bordeaux-Toulouse doit être maintenue avant 2030, selon des sources proches du dossier, jointes par l'AFP.
Le report probable des autres lignes au-delà de l'horizon 2030 provoque déjà l'ire des élus locaux, nombreux à mettre la pression pour infléchir l'arbitrage du gouvernement.
Boycott des ministres
Les élus alsaciens, de droite comme de gauche, sont les plus virulents. Ils ont adressé lundi un courrier à François Hollande pour protester contre un éventuel report de la deuxième phase de la ligne LGV Rhin-Rhône.
Le maire de Mulhouse et sénateur UDI Jean-Marie Bockel s'est "refusé à croire qu'on cherche à punir l'Alsace (majoritairement à droite) d'avoir mal voté" en reportant ce projet.
Dans l'Aude, les élus ont boycotté la venue de ministres pour défendre la LGV Montpellier-Perpignan. Les élus d'Aquitaine et de Bretagne se sont également élevés contre le report des lignes Bordeaux-Hendaye, Paris-Brest et Paris-Quimper.
"Discours de vérité"
A deux jours du rendu de son rapport, Philippe Duron refuse de confirmer les nombreuses fuites, mais défend un "discours de vérité".
"On ne peut pas faire la totalité des projets tels qu'ils avaient été inscrits dans le Snit", a déclaré le député-maire de Caen à l'AFP, rappelant que le catalogue pesait initialement 250 milliards d'euros sur 25 ans. "Ni l'Etat, ni les collectivités locales ne seraient en capacité de financer à un rythme forcené toutes ces infrastructures".
Dans un contexte budgétaire difficile, les LGV doivent être remisées au profit d'autres projets, selon des sources concordantes.
Le rapport insiste sur les "nœuds ferroviaires", destinés à désengorger le trafic des trains de banlieue et des grandes gares. Ces chantiers concernent, entre autres, la gare de Lyon et celle de Saint-Lazare à Paris, la Part-Dieu à Lyon ou la Saint-Charles à Marseille.
"Il y avait des risques de congestion qui pouvaient réduire à néant les efforts de gain de vitesse", justifie Philippe Duron.
Les grands chantiers ferroviaires et routiers restent suspendus aux arbitrages budgétaires du gouvernement. Dans son rapport, la commission 21 envisage deux scénarios.
« Des choix de cohérence »
Le premier table sur les ressources actuelles de l'Agence de financement des infrastructures de France (AFITF). Ce cas de figure, qualifié de "réaliste" par Philippe Duron, prévoit un investissement de 10 milliards d'euros à l'horizon 2030.
Le second, "plus ambitieux", propose de consacrer 30 milliards aux infrastructures de transports d'ici 2030. L'effort supplémentaire doit notamment être financé en réaffectant la moitié de l'écotaxe poids lourds au budget de l'AFITF, soit plus de 400 millions d'euros par an.
Du côté du gouvernement, on esquive pour le moment les polémiques. "Nous souhaitons avoir des choix de cohérence sur la modernisation des infrastructures", s'est contenté d'indiquer le ministre délégué aux Transports Frédéric Cuvillier.
Le compte rendu de Ouest-France, ce 27 juin 2013:
http://www.entreprises.ouest-france.fr/article/grands-projets-transports-qui-deraillent-27-06-2013-102770?utm_source=rss&utm_medium=ofentreprise&utm_campaign=rss_info_toute
Les grands projets de transports qui déraillent
Quels projets ferroviaires et routiers verront le jour ? La commission « Mobilité 21 », chargée de fixer les priorités, rend son rapport ce jeudi. Et ça grogne déjà.
La Ligne à grande vitesse jusqu'à Brest ou Quimper ? Pas avant 2030. L'autoroute 831 entre Fontenay-le-Comte et Rochefort ? Aux oubliettes. Tout comme l'électrification de la ligne ferroviaire Nantes-Tours-Lyon.
80 projets au départ, 9 à l'arrivée (20 si l'on décide de grossir l'enveloppe). La commission présidée par Philippe Duron a dû tailler à la tronçonneuse. Avec un critère : éliminer en priorité les chantiers trop coûteux par rapport à leur utilité.
Une quinzaine de projets passent ainsi à la trappe. Les autres sont classés en trois catégories : « première priorité » qui devraient voir le jour avant 2030, « seconde priorité » qui devront attendre entre 2030 et 2050 et « horizon plus lointain », remis aux calendes grecques.
Pour l'Ouest, sont considérés comme prioritaires : le désengorgement ferroviaire à l'ouest de Paris, en direction de la Normandie et le « secteur ferroviaire » de Rennes.
« Il y avait urgence à mettre de l'ordre »
Point de vue par Jean-Marc Ayrault Premier ministre.
« Mon gouvernement avait hérité de l'équipe précédente un vaste plan de projets d'infrastructures nouvelles de transport : 245 milliards d'euros de projets non financés, sans aucun ordre de priorité, conçus sans même qu'ait été regardé l'état réel des infrastructures existantes. Il y avait urgence à mettre de l'ordre dans cet inventaire, à définir un projet ambitieux, réaliste et cohérent. C'est à cela que s'est attelée la commission Duron qui rend aujourd'hui son rapport.
« Ne soyons pas polarisés sur les seules lignes TGV »
En tant que Premier ministre, je voudrais m'adresser à tous les territoires pour leur faire part de mon diagnostic, de mon ambition, et de ma méthode en matière de transport.
Mon diagnostic, c'est que la focalisation exclusive sur les grands projets masque les vrais enjeux des transports, qui sont les transports au quotidien sur lesquels le potentiel d'amélioration est énorme. Je veux une France où les gens auront les moyens de transport pour aller au travail, à l'école, à l'université, où les entreprises disposeront des moyens d'accès et de transport pour se développer, et être compétitives. Une France où chacun disposera d'une mobilité durable, pour produire, pour se former, se détendre, innover, pour se cultiver ou encore pour se soigner.
Mon ambition est celle d'investissements pensés au service de transports efficaces : créateurs de croissance, créateurs d'interactions, et non simplement emblématiques. Par exemple, ne soyons pas polarisés sur les seules lignes à grande vitesse lorsque des trains circulant à 200 km/h à un coût moindre pour les voyageurs peuvent rendre un service économique et social supérieur. Je veux des transports sobres, pensés à chaque fois au sein de leur territoire, et accessibles en termes de coût pour les utilisateurs.
Sur ces principes, ma méthode c'est le contrat, c'est la négociation avec les élus des territoires. Le sérieux budgétaire n'est pas la fin de l'investissement : je veux au contraire qu'il soit l'occasion de rompre avec le réflexe d'un plan qui vient d'en haut, au profit d'une vision fine et concrète. Soyons créatifs. Le 9 juillet prochain, je rendrai public le plan d'investissement du gouvernement. Il concernera les transports, mais également tous les autres aspects de la préparation de l'avenir. Il sera l'occasion de présenter une doctrine d'investissement qui privilégie l'efficacité sur l'affichage, au service de tous les territoires. »
NDLR. Titre et intertitre sont de la rédaction de Ouest-France.
« Tout le monde n'aura pas le TGV »
Entretien avec Philippe Duron. Député-maire PS de Caen, président de la commission « Mobilité 21 ».
Quel est votre constat sur le ferroviaire ?
Le système français, de bonne qualité, est en danger. Le réseau connaît un triple problème de maintenance, de rénovation et de modernisation du réseau. Les TGV sont en retard aux heures de pointe. Les grandes gares sont saturées. À quoi cela sert de mettre des milliards pour ne pas arriver à l'heure ? Aujourd'hui, la problématique n'est plus la grande vitesse. C'est d'assurer le transport de tous, dans de bonnes conditions, sur tous les territoires. Pour cela, il nous faut modifier la gouvernance de la politique des transports en France.
Vos préconisations ?
Tout le monde n'aura pas le TGV. Et il nous faut d'abord renforcer l'efficacité du système. En nous calant sur le schéma européen des transports, nous proposons trois calendriers : avant 2030, entre 2050 et après 2050. Avant 2030, deux scénarios A et B sont établis. Cela si l'Agence de financement des transports, l'Afit obtient - ou non - des financements plus ambitieux. Si oui, cela permettrait de passer les investissements de l'Afit de 800 millions à 1,3 milliard par an. Dans tous les cas de figure, le désengorgement du Mantois sur la ligne Paris-Normandie, est acté. C'est une bonne nouvelle pour les Normands.
Quelles autres réalisations avant 2030 ?
La nouvelle ligne LGV Bordeaux-Toulouse est prévue. Quatre nouvelles lignes LGV, vers Rennes, Strasbourg, Bordeaux et Nîmes-Montpellier sont en construction. Cela sera désormais impossible. Il nous faut trouver un équilibre entre ces lignes très onéreuses - sans parler du coût des redevances à Réseau ferré de France - et le quotidien de nombreux voyageurs qui passent par les trains régionaux.
Rien pour les Bretons avant 2030 ?
Les Bretons comme les Aquitains sont bénéficiaires de lignes en construction. La ligne nouvelle va rapprocher l'ensemble de la Bretagne de Paris. Certes, nous avons eu une demande forte des Bretons mais le projet d'un TGV à l'ouest de Rennes n'est pas prioritaire. Chacun défend son territoire, c'est bien normal. Il va me falloir le meilleur gilet pare-balles de la République ! Mais, je note que personne ne remet en cause le sérieux de la commission.
Commentaire de Florestan:
Rien pour les Bretons avant 2030? Eh bien oui! pour une fois... ça donnera enfin le temps de reconstruire la Normandie ferroviaire située derrière le premier potentiel maritime français ou le 5ème ensemble portuaire européen...
ENFIN GRAND MERCI A PARIS-NORMANDIE QUI NOUS PERMET DE TELECHARGER EN LIGNE LE RAPPORT DURON
http://www.paris-normandie.fr/media/les-plus/Rapport%20Mobilit%C3%A9%2021.pdf
Cliquer à partir de la page 42 pour avoir les tableaux hiérarchisant les projets et à partir de la page 52 pour une présentation de la LNPN