YVETOT: Le civisme, une valeur normande?
On connait bien la formule: "c'est mon dreit et j'y ti" (c'est mon droit et j'y tiens) qui trahit l'emprise culturelle et séculaire du droit normand dans les mentalités de la société civile normande jusqu'à aujourd'hui.
Le respect des règles implicites (coutume) ou explicites (droit écrit) semble être une chose à laquelle on donne plus d'importance en Normandie qu'ailleurs en France. Certains diront pour s'en plaindre que cette mentalité normande respectueuse du droit peut sombrer dans une sorte de soumission à l'ordre légal présent par excès de légitimisme. Mais le souci du droit et du respect des règles reste vivace dès lors qu'il s'agit de s'opposer à des décisions publiques ou privées arbitraires voire illégales: le Normand est toujours aussi procédurier, les promoteurs immobiliers qui opèrent dans notre région le savent que trop bien.
Mais avant que les règles ne soient enfreintes par quelques malotrus, il y a le rappel des devoirs élémentaires du civisme qui nous permettent de nous supporter les uns les autres, à défaut de vouloir et de pouvoir nous connaître, de nous apprécier ou de nous aimer: le chacun chez soi, la volonté farouche des Normands (à l'instar des Anglais aussi) de préserver leur "privacy" (faire ce que l'on veut chez soi à l'abri des regards étrangers) implique la contrepartie du civisme sur l'espace public où doit s'exercer la paix publique comme une mer calme desservant toutes nos îles privées dans l'archipel de la liberté.
Depuis cette légende, qui n'en est peut-être pas une, qui nous conte l'histoire de cet anneau d'or accroché dans un arbre par le duc Rollon lui-même pour bien faire la preuve que la paix publique était rétablie en Normandie, anneau d'or que nul n'avait osé dérober, le civisme est une des valeurs normandes les plus fondamentales toujours transmises aux jeunes générations.
- Ainsi à Yvetot, cette initiative pleine d'intelligence proposée par les jeunes du conseil municipal:
Yvetot. Pas toujours facile de trouver une place pour stationner : augmentation de la population, attractivité de la gare, petites incivilités. C’est contre ces dernières que sont partis en guerre les jeunes conseillers municipaux.
Mercredi dernier, on a pu voir de drôles de contractuelles qui déposaient de curieux PV sur les pare-brise des véhicules mal garés. Que l’on se rassure, la Ville n’a pas augmenté en catimini les effectifs de sa police municipale. Agathe, Mallaury, Périne, Clémence, Aude et William, tous collégiens et lycéens, font partie du conseil municipal jeune. À ce titre, ils ont pour tâche de réfléchir sur ce qui ne va pas dans notre ville et d’y apporter des solutions pratiques. Parmi les problèmes connus, celui du stationnement est récurrent, notamment les jours de marché et autour de la gare. Mais ce n’est pas une raison pour faire n’importe quoi et ne pas respecter le code de la route. Celui-ci est très clair : un stationnement dangereux, gênant ou abusif est sanctionné d’une amende de 135 euros. D’où l’idée des jeunes de lancer une opération de prévention, qu’ils ont ironiquement baptisée «Gare aux mal garés!»
Ils ont imaginé un PV sous forme d’un triangle qui rappelle aux indélicats qu’il est interdit de stationner sur les passages piétons, les pistes cyclables, les trottoirs et les emplacements réservés aux personnes handicapées, aux ambulances, aux taxis, aux cars. Le triangle précise également que la Ville offre un circuit de Vikibus reliant, les jours de marché, le centre-ville aux parkings gratuits du cimetière Saint-Louis ou du square Bobée.
Le périmètre de la zone bleue pourrait être élargi
Pour Brigitte Joutel, présidente de l’union commerciale et artisanale d’Yvetot, le problème se situe moins dans les incivilités que dans les voitures ventouses : « Les voitures ne tournent pas assez. Elles sont du matin au soir sur la place des Belges. Leurs propriétaires, qui travaillent en centre-ville, les garent le matin et ne les reprennent que le soir, se contentant de changer leur disque toutes les heures et demie. C’est autant de place en moins pour nos clients!»
Du côté de la mairie, Émile Canu et son conseil planchent, depuis de nombreuses, années sur le sujet : « Nous avons créé deux nouveaux parkings, un à la gare de 105 places et un autre de 70 places, à l’emplacement de l’ancienne piscine. Logéal, lorsqu’il a rénové son siège social situé derrière l’église, a ouvert des places de parking pour ses agents. Nous avons demandé aux employeurs du centre-ville d’inciter leur personnel à se garer sur les parkings gratuits de Saint-Louis et du square Bobée et de prendre le vikibus. Nous avons créé des navettes gratuites, les jours de marché, pour relier le centre-ville aux parkings. Des panneaux mentionnant le temps de marche des parkings vers l’hyper centre ont été installés (temps inférieur à 5minutes). J’ai demandé personnellement à la police municipale d’appliquer strictement la réglementation concernant la zone bleue, où le stationnement est limité à 1h30. Le périmètre de cette zone bleue pourrait d’ailleurs être élargi et concerner ainsi les rues des Chouquettes, Haëmers, Clovis Cappon, Saint-Pierre, Docteur Roux, l’Union et une partie du parking de l’Hôtel de Ville. Sans oublier le problème des voitures de location de la société Avis qui se sert du parking de la gare comme d’un garage, société avec qui nous sommes en contentieux. »
Comme on le voit, les pistes de réflexion sont nombreuses. De toute façon, aucune ville moyenne n’a résolu durablement ses problèmes de parking sans la bonne volonté de ses habitants. La fin des incivilités et l’arrêt des voitures ventouses créeraient immédiatement des dizaines de places disponibles. Et n’oublions jamais cet adage bien connu des édiles : quand on peut se garer facilement dans une ville, c’est qu’elle est en train de mourir !