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L'ETOILE de NORMANDIE, le webzine de l'unité normande
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4 mars 2019

ELETOT ou comment vivre sans INTERNET ou presque!

L'Etoile de Normandie vous propose de lire cet excellent reportage de Clémence Dupont de la rédaction de Paris-Normandie:

Vivre et travailler à la campagne c'est agréable et c'est l'un des atouts principaux de l'attractivité résidentielle de la Normandie que de pouvoir vivre et travailler à la campagne ou au bord de la mer pas très loin d'une ville (une ville de 10000 habitants tous les 25 à 30 km; Caen, Rouen ou Le Havre à deux heures de voiture maximum en région; proximité de la Normandie avec la région parisienne). Mais si vivre à la campagne signifie une déconnexion numérique partielle sinon totale, l'effet d'enclavement physique se double d'un effet d'enfermement psychologique qui peut transformer les territoires ruraux en repoussoir.

La fin des zones blanches et la généralisation de la fibre 4G sur l'ensemble du territoire normand sont des priorités absolues en terme d'aménagement du territoire normand et avoir laissé ce chantier aux seuls départements a été une erreur commise pendant les dernières années de la division régionale normande avec pour conséquence, de fortes disparités territoriales entre les départements normands: les départements avaient, soit du retard (Orne, Seine-Maritime) soit de l'avance (Manche, Calvados) ou n'avaient pas choisi les mêmes standards ou protocoles techniques (Orne). Le localisme départementaliste ne pouvait donc pas prendre en charge une politique publique éminemment normande puisqu'il faudra attendre la réunification pour que l'intérêt général normand soit enfin pris en charge par un conseil régional normand digne de ce nom.

En effet, le plan de désenclavement numérique normand a été repris en main par la région Normandie et ses financements avec l'objectif d'une Normandie entièrement couverte à l'horizon 2020/2023.


https://www.paris-normandie.fr/actualites/societe/plongee-au-cur-des-doleances-6-7-la-fracture-numerique-au-cur-du-territoire-a-eletot-HE14678917?utm_source=newsletter_mediego&mediego_euid=7b65029da2&mediego_ruuid=9cabfa57-f8c9-4a2a-9184-e67009437ebe_5&mediego_campaign=20190303_news_actu&utm_content=20190303&utm_campaign=newsactu&utm_medium=email#

« Plongée au cœur des doléances » (6/7) ; la fracture numérique au cœur du territoire, à Eletot

Plongée au cœur des doléances (6/7). Nous illustrons chaque semaine le Grand débat à travers une thématique mise en perspective dans un village normand. Aujourd’hui, la déconnexion numérique à Életot.

Eletot

«Téléphoner ou envoyer des mails, il faut choisir ! » Et encore, comme au bon vieux temps des premiers modems, même envoyer un simple courriel peut être laborieux. « Ça peut mettre du temps. Là par exemple, ça fait deux minutes que ça rame. Quand j’arrive à 8 heures, je lance tout ». Et Céline Rasse croise les doigts. Il y a des moments avec et d’autres sans : « Certains créneaux horaires, on ne peut pas aller du tout sur internet. Pendant les vacances, les mercredis ou le soir, quand les enfants jouent aux jeux en ligne notamment », explique la secrétaire de mairie d’Életot (près de Fécamp). « Même le recensement n’a pas été possible ». Faire sa déclaration mensuelle de chômage, son renouvellement d’allocations, la plupart des démarches administratives... Les Életotais, vivants en pleine zone blanche, sont les archétypes des victimes de la « fracture sociale et territoriale » induite par cette déconnexion et récemment dénoncée par un rapport du Défenseur des droits. La « dématérialisation » (numérisation des procédures administratives)prônée partout n’a pas cours ici : « Je ne peux même pas ouvrir le site de l’Urssaf, on est obligé de tout faire encore par courrier. Et en insistant, parce qu’on me conseillait de trimballer tous les dossiers pour aller faire les démarches dans un cyber café ! ». Céline mesure pourtant la « chance » d’être à la source de la parabole installée sur le toit de la mairie qui « redispatche le Wifi » alentour : « Moi je suis branchée directement, alors imaginez les autres. » Si, en théorie, la connexion est possible à Életot, dans la pratique c’est plus compliqué. Car ici, tous ne sont pas égaux devant le réseau. Selon que vous soyez dans le centre ou plus près de la valleuse, dans les champs ou en bord de falaise, le débit peut passer du simple au centuple !

« Inéligible ». C’est la sentence d’Életot, désespérément grise sur la carte du très haut débit en France. Heureusement, après cinq ans de démarches, les premiers aménagements pour l’installation de la fibre, attendue comme le Messie, ont commencé. Son déploiement devrait intervenir cette année, probablement en septembre. Une fois cette question de bande passante réglée, il restera un problème de débit de taille : celle de l’eau. En raison de canalisations sous-dimensionnées qui ne fournissent pas assez de pression, la commune doit se doter de pas moins de six réserves incendie.

« Passer de l’impasse à l’autoroute numérique »
Paul Le Guen, Breton d’origine et maire d’Életot sans étiquette.
Percevez-vous la nécessité de mesurer, avec les cahiers de doléances, les raisons de la colère exprimée par les « gilets jaunes » ?
Paul Le Guen : « Notre « cahier citoyen » de doléances a fait l’objet de quelques contributions. Mais le grand débat dans une commune voisine n’a pas déplacé les foules (7 personnes, NDLR)... Je suis pour ma part un peu gêné par le mouvement des « gilets jaunes » : au début ça paraissaikt plausible, mais maintenant on ne sait plus pourquoi ils manifestent... Ça tire sur tous les bords et le fait que ça se passe dans la rue me dérange : j’assume mon côté « Gaulois réfractaire » et j’ai personnellement voté blanc au deuxième tour de la présidentielle, mais il y a le bulletin de vote, on doit le respecter. »
Avez-vous le sentiment que les pouvoirs publics peuvent apporter des réponses aux revendications ?
« Les pouvoirs publics n’ont pas la volonté de changer les choses. Il y a un manque de volonté politique. Beaucoup tirent la couverture à eux, ou tirent les uns contre les autres. Souvent, ils ne sont pas capables de s’arranger pour un programme commun. Ils sont contre pour être contre, avec des positions de principes. Même ici dans la commune, même si ça va dans le sens de l’intérêt général. La France a une belle devise, mais on a oublié la fraternité ! Et l’égalité aussi, ça pêche entre la ville et la campagne. On a souvent l’impression que tout est tiré vers la ville centrale de l’agglo... Ceux qui sont aux manettes considèrent qu’un citadin vaut plus qu’un rural. C’est un peu David contre Goliath, mais on y arrive quand même à force de temps de persuasion. Et de nuits blanches ! Mais pour cela, mieux vaut mieux pas être trop politique... »
De quelle manière agissez-vous pour faciliter l’accès au numérique dans la commune ?
« Avec le déploiement de la fibre prévu en septembre prochain, et pour lequel nous avons obtenu d’être servi les premiers, nous allons passer de l’impasse à l’autoroute numérique ! Vous ne pouvez pas savoir ce que ça fait : pour nous, c’est Noël ! Mais avoir internet ne suffit pas. Encore faut-il pouvoir s’en servir. Avec notre projet d’écoquartier qui intégrera une maison de service au public, nous aurons la possibilité de dispenser des cours et d’aider aux démarches administratives pour les personnes âgées notamment. Les personnes au chômage n’auront plus besoin d’aller pointer à Fécamp tous les mois. »
« 300 € de budget »
« Pourquoi pas nous ? »
« À Sainte-Hélène-Bondeville, Senneville-sur-Fécamp ou Saint-Pierre-en-Port (les communes limitrophes, NDLR), ils en ont bien ! Pourquoi pas nous ? » Jean-Claude Allais habite la côte de Senneville, avec vue sur un champ exploité par un des quatre agriculteurs restants dans la commune, dont deux seulement ont des héritiers. « Pour les téléphones portables, il y a des jours ça passe... D’autres non, relativise le retraité. Quel que soit l’opérateur, ça ne change rien : SFR, Orange ou Free, de toute façon, il faut au moins monter à l’étage. Depuis deux jours par exemple, plus rien ! Et pour internet, de toute façon, ça fonctionne plus ou moins bien, même avec la parabole et l’abonnement à 39 euros par mois. Vers 18/19 h par exemple, ça rame, parce que tout le monde tire dessus. »
Si lui n’est pas un grand utilisateur d’internet, reconnaissant que « ce n’est pas trop [s]on dada », il convient qu’« on a toujours besoin de l’informatique, mais il faut du matériel, l’imprimante... Même pour les relevés de gaz, celui qui n’a pas internet, comment il fait aujourd’hui ? » Et pense aux autres : « On retombe vite sur terre ici. Les jeunes ou les commerçants qui voudraient s’installer y pensent à deux fois : ne serait-ce que le paiement par carte bancaire serait impossible ! » À part deux gîtes, il ne reste en effet plus grand-chose de l’activité commerciale d’antan à Életot.
La place centrale du Marquais a fait le deuil des quatre bars qui l’ont occupée. L’épicerie, comme la boulangerie, ont fermé depuis plus de dix ans, et un récent dépôt de pain n’a pas fonctionné.
« Pouvoir jouer en ligne »
« C’est un peu dérangeant, c’est vrai », reconnaît Mattéo. C’est désormais plus facile pour le jeune homme, entré cette année en seconde au lycée Descartes de Fécamp. À 16 ans, il est désormais connecté avec son portable... Au moins en journée cinq jours par semaine. Ce qui lui permet de relativiser et de mieux supporter la déconnexion forcée qu’il subit deopuysi qu’il habite la commune. Mais qui n’aurait pas que des désavantages : « Il n’y pas que ça ! Cette absence de réseau nous ramène a la réalité. Sortir, jouer ou faire ses devoirs plutôt que de rester toute la journée devant la console. » Le jeune homme réprimant un sourire se réjouit tout de même de la possibilité de bientôt « pouvoir jouer en ligne »... Ce n’est pas l’avis de tous les jeunes de la commune, dont la plupart déplorent cette mise à l’écart du monde forcée : « Netflix, Skype, Instagram, on oublie... »
Même son de cloche dans la cour de récréation de l’école, qui regroupe 65 élèves sur deux classes et une maternelle : tous les enfants y déplorent à différents niveaux et avec leurs mots la lenteur du réseau. Deux tableaux tactiles numériques - qui ne sont donc pas connectés - viennent pourtant d’être installés en grande pompe ! Une maman qui souhaite garder l’anonymat déplore que la commune n’ait « pas pris le train en marche : il y a une dizaine d’années, une pétition avait réuni environ 400 signatures pour l’achat d’un répétiteur ADSL. Mais le maire a préféré consacrer ce budget à la réfection du toit de l’église ».
« Je ne téléphone plus »
« On ne capte rien ! On est obligé de sortir ou d’aller dans des endroits bien spécifiques de la maison. Chez moi par exemple, c’est un coin à côté de la télé. Mais pour que les conversations ne soient pas trop hachées, il n’y pas intérêt à trop bouger. Mais même comme ça, ça coupe ! » Patrick Dufresne a acheté récemment sa maison de retraite sur la route de la valleuse, un des pires endroits de la commune pour la couverture des téléphones portables comme pour celle d’internet.
Pas de regret cependant pour l’ancien Rouennais qui retape sa nouvelle maison : « C’est le paradis ici, même si plus on est dans la valleuse, moins on capte. C’est vrai que c’est un peu galère, même si je ne suis pas un dingue de tout ça. Moi, ça ne me dérange pas trop, parce que je ne me sers pas trop de tout ça. Mais quand j’ai des invités chez moi, il faut qu’ils montent à l’étage pour passer un coup de fil ! Mon problème à moi, c’est la télé qui ne fonctionne pas tout le temps : elle est tombée en panne pendant la demi-finale de la coupe du monde France Belgique... Là, je l’avais mauvaise. Et mon téléphone fixe a quand même été coupé pendant trois mois l’année dernière ! Du coup, vu que le portable, ce n’est pas la peine, je ne téléphone même plus. » L’ancien citadin pense aux conséquences sur la vie de sa nouvelle commune : « Il y a une baisse certaine de la valeur des maisons, des ventes qui ne se font pas pour cette raison... » Et l’arrivée de la fibre ? « On en parle apparemment depuis tellement longtemps ici que les gens n’y croient plus trop. »
Des raisons d’espérer

Internet.

La fibre arrive ! Une opération indolore pour les finances de la commune, l’installation par Orange étant financée par le Sivom de Valmont, le Conseil Départemental et l’Agglomération Fécamp Caux Littoral.

Bistrot.

Bientôt un café de village multiservices de proximité à Életot (dépôt de pain, tabac, journaux, petite épicerie avec produits du terroir) et lieu de vie culturelle.

Écoquartier.

Un éco-quartier est en voie de réalisation, l’étude préliminaire est terminée et la phase de réalisation va enfin voir le jour.

Site classé.

La commune d’Életot voudrait s’associer avec Saint-Pierre et Sassetot au projet Grand site des falaises d’Étretat-Côte d’Albâtre.

« Il n’y a que deux personnes dans toute la commune qui peuvent bénéficier de l’ADSL. C’est parce qu’elles ont en limite de Saint-Pierre-en-Port et profitent de leur réseau », déplore Olivier Leboucher.Travaillant avec sa femme dans l’Éducation nationale, le couple a une activité en parallèle : « La chatterie des griffes de Caux », où ils élèvent une quinzaine de chats Maine Coon par an, ces « doux géants » comme ils les nomment. « Nous, on ne fonctionne pas par le satellite, c’est trop cher. On a un domino 3G, de toute façon limité à 10 Go par mois. Ça fonctionne de temps en temps... S’il fait très beau ! Cet été, on a pourtant eu une panne pendant un mois. Quant à l’émetteur WiMax installé sur la mairie, une haie d’arbres nous en bouche l’accès. » Ce qui n’est pas sans conséquences : « Ça a un impact sur notre vie. Ma femme est professeur et doit rester au lycée de Fécamp pour remplir les bulletins des élèves, quand tous ses collègues le font de chez eux. Elle n’a pas non plus accès aux applications de l’Éducation nationale. Pour faire les mises à jour, on est obligés d’emmener nos ordinateurs dans notre famille ! » Et un impact sur l’activité professionnelle aussi : « Cela pose des problèmes financiers : je dois faire mes commandes de nourriture ou de matériel par téléphone et payer le prix fort. Nous avons deux lignes téléphoniques distinctes. Pour la télé, on doit passer par le décodeur de Canal Plus et des abonnements supplémentaires... Là, où la plupart des gens déboursent une quarantaine d’euros pour avoir la télé, internet et le téléphone, nous, ça nous coûte près de 300 € par mois ! »
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