Fééries de Noël sur le "phare de Coutances": pourquoi ne pas imaginer un festival RÉGIONAL de mapping sur l'histoire normande?
A la suite de la cathédrale Notre Dame de Rouen, église métropolitaine de Normandie, les cathédrales de Bayeux et de Coutances, désormais, revêtent un scintillant manteau de lumières parées des merveilleuses couleur de l'histoire normande.
Les techniques du "mapping" ont beaucoup progressé avec la technologie des LED qui a rejeté dans la préhistoire technique les "sons et lumières" d'autrefois car on peut faire, désormais, des prouesses visuelles sur nos vieux murs normands pour le plus grand bonheur des petits et des grands.
A n'en pas douter chaque ville normande ayant une cathédrale, une grande abbatiale ou un château pourrait proposer un superbe spectacle de mapping et une coordination voire, un festival régional du mapping historique pourrait voir le jour à partir de toutes ces initiatives locales.
A Caen, par exemple, la façade classique de l'ancienne abbaye aux Hommes, actuel hôtel de ville a accueilli un spectacle de mapping consacré à la libération de la ville en juillet 1944 et la récente mise en lumière des remparts du château ducal fondé par Guillaume Le Conquérant laisse espérer qu'on y projetera un jour, enfin, un mapping à la hauteur de l'épopée du plus célèbre Normand de l'Histoire...
A Lisieux, Sainte Thérèse attend que l'on projette son histoire sur l'ancienne cathédrale Saint-Pierre et du côté d'Evreux, de Sées, de Fécamp, de Saint-Pierre-sur-Dives ou Jumièges, cathédrales et abbatiales aussi grandes que des cathédrales attendent d'être illuminées.
La cathédrale Notre-Dame de Coutances se pare donc pour la seconde fois de lumières pour les fêtes de fin d'année, à l'instar de celle de Bayeux qui organise à l'intérieur de la nef, la réinstallation virtuelle de la célèbre broderie dans son écrin d'architecture d'origine.
Bien entendu, sur les murs de la plus parfaite et de la plus élégante des cathédrales normandes, il fallait compter une autre épopée normande, celle des frères de Hauteville qui sont partis fonder le royaume normand de Sicile et d'Italie du Sud.
Cependant, on profitera surtout de cette occasion pour rappeler que s'il y a une cathédrale normande qui peut se prêter idéalement à une mise en lumière ce serait celle de Coutances dont l'architecture et les traditions liturgiques célébraient jadis la lumière:
En effet, la cathédrale de Coutances est l'une des rares cathédrales de France à avoir conservé des traces archéologiques importantes de son système d'éclairage médiéval avec tout un ensemble d'ouvertures ménagées dans les voûtes pour permettre le passage des filins qui tenaient les lustres d'éclairage en l'air au dessus des fidèles. Sous la charpente, des treuils permettaient de descendre les lustres jusqu'à hauteur d'homme pour les allumer avant de les remonter à la hauteur requise. Mais ces treuils fonctionnaient aussi à l'instar de ce qui sera plus tard en pratique dans les cintres d'un théâtre, pour faire monter et descendre, comme par enchantement dans le noir de l'office de la vigile de Pâques, les lumières de la Résurrection ou la montée au ciel du cierge pascal pendant la messe de l'Ascension (pratique qui se faisait aussi à la cathédrale de Sées).
Plus grandiose encore:
On faisait descendre, depuis l'occulus ménagé au sommet de la voûte culminant à plus de 40 mètres de haut de la tour lanterne centrale, la "grande étoile de Coutances", entourée d'une couronne de cierges allumés et ce grand lustre figurait la descente de l'étoile de David, le jour de la Messe de Minuit.
Là-haut, dans la voûte on aperçoit les multiples percements qui permettaient le passage des filins auxquels étaient accrochés les cierges que l'on pouvait ainsi faire remonter ou descendre au gré du déroulement de la liturgie...
Enfin, la tour lanterne elle-même, recèle un secret d'architecture dédié à cette liturgie de la lumière qui faisait au Moyen-âge la réputation de Notre-Dame de Coutances: si l'on observe attentivement l'extraordinaire prouesse architecturale de cette tour lanterne élevée dans les années 1220 à la demande de l'évêque Hugues de Morville partagé entre sa fidélité nouvelle au roi de France (nous sommes après 1204) et le reste de sa famille partie en Angleterre pour demeurer fidèle au roi Plantagenêt, on s'aperçoit que la tour lanterne est double avec une partie inférieure qui éclaire l'intérieur de l'édifice à la croisée des transepts et une partie supérieure qui éclaire... l'extérieur puisque la voûte que l'on voit à l'intérieur de la cathérale ne correspond pas au sommet d'une tour lanterne culminant à près de 60 mètres de hauteur et que l'on voit de très loin, y compris de la haute mer entre les îles Chausey et Jersey.
La lanterne inférieure (voûte à plus de 40 mètres de haut) éclaire l'intérieur de la cathédrale...
La lanterne supérieure, posée par dessus, éclaire l'extérieur telle un phare culminant à près de 60 mètres de haut!
Depuis plus de 150 ans les historiens, archéologues et érudits locaux ont noirci beaucoup d'encre pour tenter de donner une explication raisonnable à cette curieuse disposition jusqu'à ce qu'ils s'accordent récemment pour dire qu'il s'agit d'un... phare liturgique avec un brasier allumé temporairementdans la chambre haute de la lanterne aux fêtes majeures de l'année chrétienne, un feu que l'on pouvait remarquer certainement depuis la mer et qui rappelait aussi à tous que l'évêque d'une vieille cathédrale normande "chemisée" dans le nouveau style venu de France n'avait pas oublié qu'il restait l'évêque des îles, autrement dit, la Normandie d'outre-mer qui est restée indépendante jusqu'à nos jours!
Depuis les hauteurs de la cathédrale de Coutances, on voit la mer et depuis la mer, la cathédrale de Coutances est un amer remarquable...
En 2008, à l'occasion du 800ème anniversaire de la reconstruction de la cathédrale de Coutances dans son style "français", nous avions proposé à la ville de Coutances et à l'évêque de l'époque d'installer, précisément, un LED tournant dans la chambre haute de la lanterne pour remettre symboliquement en service le phare de Notre-Dame de Coutances: le conseil municipal avait accueilli avec beaucoup d'intérêt cette idée et la fit même étudier avec une belle chance de mise en application...
Hélas! l'évêque de l'époque, peu informé, semble-t-il des secrets de sa cathédrale, n'en voulut point et fit obstacle à la réalisation de cette initiative qui aurait pu faire renaître Notre-Dame des lumières de Coutances et qui faisait, autrefois, le pendant dans l'Ouest de la Normandie, à Notre-Dame des fleurs de Bayeux (car à Bayeux, la spécialité liturgique de la cathédrale était la pluie de pétales de roses... une autre féérie normande!)
C'est pourquoi, à l'occasion de la mise en place d'un spectacle de mapping sur la façade de la cathédrale de Coutances, nous allons tenter de présenter, à nouveau, aux autorités locales l'idée de remettre en service en certaines circonstances, le "phare de Coutances"...