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Les lieux communs de Richard FERRAND sur la décentralisation...
En lisant ce qui suit sans avoir la berlue, on peut dire au choix:
Qui peut le plus, peut le moins... (à moins qu'il ne s'agisse du contraire!)
C'est l'hôpital qui se fout de la charité...
Les écailles lui sont enfin tombées des yeux! (Saül de Tarse, le persécuteur, devenant Saint Paul sur le chemin de Damas...)
Ou encore:
Les Shadoks du jacobinisme vertical découvrent l'horizontalité girondine... (Proverbe local...)
Bref! mieux vaut tard que jamais après trois ans d'une gouvernance macroniste plutôt autoritaire et néo-jacobine alors que le candidat Macron nous avait pourtant promis un "pacte girondin"...
L'Etoile de Normandie, le webzine de l'unité normande, rend compte de l'actualité de la décentralisation régionale, un sujet qui n'intéresse pas les grands médias sauf lorsque le président de l'Assemblée nationale s'y intéresse, à la surprise générale, à l'occasion d'un essai qu'un Richard Ferrand qu'on attendait vraiment pas dans ce type exercice, vient de faire paraître:
"Nos lieux communs, petit traité républicain à l'usage des démocrates" (éditions de l'Aube)
Le président de l’Assemblée nationale apporte son écot au débat sur la décentralisation dans un essai.
En France, on décentralise toujours par le haut. Et quand l’État réfléchit sur lui-même, il n’associe pas suffisamment les citoyens , constate Richard Ferrand. La majorité présidentielle s’est promis de changer ces mauvaises habitudes. La ministre de la Cohésion des territoires, Jacqueline Gourault, s’est engagée dans une consultation régionale pour élaborer une nouvelle loi de décentralisation, attendue dans le courant de l’année.
Commentaire de Florestan: celui qui a été capable de faire du jacobinisme parisien vertical jusqu'à la caricature serait-il capable de faire, dorénavant, rigoureusement l'inverse?
Le président de l’Assemblée nationale apporte une contribution
à cet effort collectif en publiant un essai, Nos lieux communs, aux éditions de l’Aube. Il y pointe quelques bizarreries territoriales
et formule une série de propositions inspirées de [ses] expériences de terrain
pour y remédier.
Commentaire de Florestan: la réunification de la Normandie ne fait pas partie de ces "quelques bizarreries territoriales". En revanche que la Bretagne ne soit pas réunifée, que l'Alsace ait disparue ou qu'il y ait dorénavant un rapport entre un Basque et un Limousin, relèvent, en effet, de quelques bizarreries territoriales...
Partisan d’une sorte de loi Macron des territoires
qui permettrait d’accorder une plus grande liberté aux collectivités locales
tout en musclant l’État
dans les départements, le député du Finistère voudrait que les préfets coordonnent l’essentiel des politiques publiques de proximité. Que l’État parle d’une seule voix, pour plus de lisibilité
, et que les élus comme les citoyens n’aient qu’un seul interlocuteur pour toutes leurs démarches administratives
.
Commentaire de Florestan: une fois de plus, il s'agit de vider les départements de toute substance et d'organiser un jeu de "et en même temps" entre les préfets d'un côté et le président de région, de l'autre. Pas sûr que cela soit efficace: il faudrait, en effet, cesser de confondre la décentralisation qui a comme but la régionalisation et la déconcentration qui consiste à déployer les forces de l'Etat central en "région"... La cohabitation sur le territoire de la décentralisation (collectivités territoriales et leurs compétences) et de la déconcentration (Etat central et ses administrations déconcentrées auprès des préfets) c'est précisément ce qui donne cette désagréable sensation de millefeuille administratif étouffe-chrétien!
Une vraie décentralisation aboutie (régionalisation) consisterait à confier l'ensemble des compétences des politiques publiques aux collectivités territoriales concernées et adaptées et à recentrer les préfets et leurs administrations sur le coeur même du métier de l'Etat central: assurer la paix civile, la sécurité. Assurer le contrôle de légalité. Assurer la continuité républicaine du territoire. Financer la peréquation solidaire républicaine entre toutes les collectivités territoriales de la Nation.
À cette réorganisation de la présence de l’État dans les territoires et aux nouvelles libertés – et responsabilités – données aux collectivités, s’ajoute un troisième volet, essentiel au triangle vertueux
imaginé par Richard Ferrand pour réinventer la démocratie à partir du bas
: l’instauration d’un dialogue permanent avec des représentants de la société civile
et la consultation directe des populations locales pour toutes grandes décisions les concernant.
Commentaire de Florestan: ce point est important car il ne s'agit pas de reproduire à l'échelle régionale la centralisation jacobino-parisienne qui sévit à l'échelle nationale. Il faut inventer une horizontalité girondine et démocratique qui n'existe pas.
Nos lieux communs, Richard Ferrand, éditions de l’Aube, 172 pages, 16 €.
Voir aussi ça:
Ce proche d'Emmanuel Macron appelle de ses voeux une "démocratie délibérative". "La réponse la plus simple serait probablement simpliste: un référendum d'initiative citoyenne sur tous les sujets, surtout les plus complexes. Et, en ces matières, réunir toutes les oppositions ne fait pas un projet alternatif", rejette-t-il, optant plutôt pour des "consultations locales qui proposeraient plusieurs choix sur des sujets structurants".
Issu des rangs socialistes, l'ancien ministre de la Cohésion des territoires estime aussi que "les citoyens et les associations, syndicats, organisations doivent être invités à contribuer à la réflexion sur la réorganisation de l'Etat et des collectivités locales".
Commentaire de Florestan: une institution régionale méconnue existe pourtant déjà dans le but de représenter, précisément, auprès du conseil régional et du préfet, la société civile régionale organisée. Il s'agit du CESER. On espère que M. Ferrand en parle dans son livre et qu'il nous propose d'en faire la réforme pour que la seconde assemblée régionale soit plus ouverte et plus efficace... On espère!
Le gouvernement doit présenter mi-2020 devant le Parlement un projet de loi sur un "nouvel acte de décentralisation". Annoncé fin avril dernier par Emmanuel Macron, le texte baptisé "3D" -"Décentralisation, différenciation et déconcentration"- doit répondre au besoin de proximité de l'action publique exprimé par les Français lors du "grand débat" pour sortir de la crise des "gilets jaunes".
M. Ferrand appelle Etat comme collectivités à "fuir la mortifère tentation des trois D: défausse, dilution et dévoiement de responsabilités".
Ne pas attendre un "Grand Soir" de la décentralisation
Il suggère de "rassembler les services déconcentrés de l'Etat sous la coordination du préfet de département" ou "libérer les collectivités du contrôle de légalité par le représentant de l'Etat".
Commentaire de Florestan: le risque n'est-il pas d'éviter la concurrence frontale des légitimités et des compétences entre la Région et l'Etat en région?
Sans attendre un "grand soir de la décentralisation"ou une révision constitutionnelle, le député du Finistère préconise des "expérimentations pratiques".
"Instrumentaliser la décentralisation pour préparer l'alternance nationale, se servir d'associations d'élus comme de camps de base d'aventures politiques personnelles, ce serait abîmer et la décentralisation et les élus ainsi mal représentés", prévient-il aussi en allusion aux grandes associations d'élus dirigées par la droite.
Commentaire de Florestan: voilà prévenue l'association "Territoires unies" qui rassemble les associations des maires, des départements et des régions de France...
Favorable à une Assemblée de Bretagne
Interrogé par nos confrères du Télégramme, le député du Finistère précise : " ce qui me frappe, c'est que la décentralisation a toujours été organisée de haut en bas. Cela donne parfois des aberrations au niveau local."
Commentaire de Florestan: cela porte un nom, et cela s'appelle le jacobinisme dont la première manifestation fut d'oser imaginer une France découpée en 80 carrés de 80 lieues de côté (projet Thouret, 1789) et la plus récente fut de fusionner des régions entre elles pour donner le machin du Grand Est ou l'improbable Arvernorhodalpie (2015).
Evoquant les strates de décision et l'hypothèse d'une suppression des départements, Richard Ferrand ajoute : " Dans ce que je propose, il n'y aura pas ce genre de dogme! C'est au niveau local que ce genre de décision peut se prendre. Pour ce qui concerne la Bretagne, je suis favorable à une Assemblée Régionale : on pourrait soumettre l'idée aux Bretons."
Commentaire de Florestan: une assemblée régionale de Bretagne ouverte aux ressortissants du CD44? Autre question: comment cette nouvelle assemblée régionale (de citoyens? élus? tirés au sort?) va s'articuler avec l'assemblée du conseil régional, l'assemblée du conseil économique social et environnemental, la conférence territoriale de l'action publique... J'en oublie certainement une! Bref! pas sûr que cela aille dans le sens de la simplification efficace qu'appelle de ses voeux Richard Ferrand!
Un service civique pour les retraités ?
Richard Ferrand appelle enfin à "soutenir l'engagement pour l'intérêt général". En pleine réforme des retraites, "je ne veux pas provoquer inutilement. Mais pourquoi ne pas proposer un service civique à compter de l'âge légal de la retraite? Beaucoup de nos concitoyens ont alors encore de longues années à vivre en bonne santé, et surtout tant de choses utiles à transmettre", écrit-il en évoquant des "avantages incitatifs", par exemple fiscaux, pour les volontaires.
Commentaire de Florestan: attention à ne pas renforcer la gérontocratie! Les retraités sont déjà ceux qui sont les plus impliqués dans la vie sociale (associations) et la vie politique locale (élus locaux). De plus, les retraités sont ceux qui s'abstiennent le moins aux élections et qui ont le plus voté pour la République en Marche (tiens, tiens, tiens...)
Conclusion de Florestan:
Emmanuel Macron, cet homme pressé qui veut être le maître des horloges voudrait que nous passions à la suite de ce qu'il a décidé pour l'animation médiatique du débat politique. Le débat sur la décentralisation doit escamoter ce divertissement du charivari national sur la réforme des retraites qui n'a que trop duré! Mais à l'instar des réalités géographiques de nos belles provinces, les réalités politiques font de la résistance.
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