2016: L'ANNEE DETERMINANTE POUR L'AVENIR DE LA NORMANDIE
La rédaction de l'Etoile de Normandie a reçu ce jour le dernier communiqué de Didier Patte, président du Mouvement Normand, qui revient sur l'année écoulée, désastreuse et terrifiante sur bien des aspects sauf pour la Normandie. L'année 2016 s'annonce comme l'année de la refondation de la Normandie dans l'urgence de problèmes structurels non résolus de plus en plus inquiétants: le manque de médecins, la déshérence des transports ferroviaires, l'enclavement persistant du port du Havre, le risque de subordination à la région parisienne, la concurrence frontale avec le futur Canal Seine Nord Europe...
Le service de l'intérêt général normand tient désormais du devoir du pompier: il faut éteindre les incendies, question de vie ou de mort!
LE SEMAINIER DU MOUVEMENT NORMAND
COMMUNIQUE N° 232 – SEMAINE 53 – DECEMBRE 2015
L’ANNEE DETERMINANTE
Quand ce message parviendra à ses destinataires, l’année 2015 tirera sur sa fin. Année mouvementée au plan international comme au plan national, année de refondation au plan normand.
La France est aux prises avec un totalitarisme barbare. De nombreux soldats, marins et aviateurs d’origine normande sont en missions, certaines de combat, avec leurs camarades venant du reste de la Métropole ou de l’Outre – Mer… Sur notre sol même, des attentats criminels et irrationnels suscitent l’indignation et l’inquiétude et les forces de l’ordre sont sollicitées presqu’au-delà de leurs capacités d’intervention. Notre monde politique est désemparé et l’opinion publique gronde.
Au plan politique justement, le Gouvernement s’est trouvé désavoué par de piètres résultats aux élections départementales et régionales, après avoir connu la défaite aux élections municipales et européennes. Le chômage s’étend, les réformes tardent, la société est divisée plus que jamais. L’activité économique stagne et le commerce extérieur s’enfonce : il n’y a pas de quoi pavoiser.
La Normandie, dans tout cela, souffre des mêmes maux et son déclin relatif s’accélère. On souhaiterait qu’elle se reprît : peut-être les Normands en ont-ils pris conscience au cours des campagnes électorales (ce n’est pas certain car les problèmes nationaux ont pris le pas sur les problèmes locaux et régionaux). Cependant, et c’est, là, l’élément essentiel à prendre en considération, l’année 2015 aura été déterminante pour la Normandie et autorise tous les espoirs, toutes les espérances.
La Normandie est la seule « nouvelle » région créée par la Loi de janvier 2015 qui ne pose aucun problème d’incohérence… à telle enseigne que le texte consacre le nom même de Normandie alors qu’autre part, on se creuse la tête pour dénommer ces conglomérats disparates que sont Alsace – Lorraine – Champagne-Ardennes ou Aquitaine – Poitou-Charentes – Limousin. Les oppositions à la réunification normande se sont tues et essaient vainement de s’exprimer à travers le faux problème de la « Capitale régionale ». Les nouveaux élus du Conseil Régional de Normandie ont tous les éléments pour se déterminer en faveur d’un partage de compétences entre Rouen (chef-lieu avec la Préfecture régionale) et Caen (siège du Conseil régional). Le Havre devrait pouvoir tirer son épingle du jeu en devenant le siège d’Haropa, la direction de la logistique normande, voire le lieu où pourrait s’installer la Chambre régionale de Commerce et d’Industrie. Un minimum de bonne volonté de la part des élus – toutes tendances confondues – devrait permettre une telle harmonisation, sans oublier de promouvoir des rôles spécifiques dévolus aux autres villes qui, toutes, peuvent faire valoir des fonctions particulières (à Cherbourg, les E.M.R. – énergies marines renouvelables - ; à Saint- Lô, un pôle agro-industriel ; à Alençon, la plasturgie, etc.). Dès lors que le souci de tous sera la recherche d’un aménagement du territoire normand équilibré, tous les espoirs sont permis pour dynamiser l’ensemble. La Normandie peut devenir un modèle en utilisant sa « chance » d’être une région polycentrique, évitant ainsi toute micro-centralisation au bénéfice d’une seule ville, fût-elle déclarée métropole.
En effet, tout n’est pas rose dans l’application de la Loi MAPAM qui entend définir les rôles et fonctions de la Région et de la Métropole Rouen – Normandie : l’affrontement, qui promet d’être rude, devrait cependant se conclure par un « modus vivendi » : c’est l’intérêt bien compris de ces deux entités. On peut regretter cependant – c’est la position du Mouvement Normand – que le législateur ait placé sur le même rang Métropoles et Régions. Les premières devraient hiérarchiquement et administrativement dépendre des secondes.
De même, les départements – qui ont un rôle évident à jouer – devraient reconnaître le « chef- de- filat » (quelle expression bizarre !) des régions. Le fait, qu’en Normandie, les exécutifs des différentes collectivités départementales et régionale soient de la même tendance politique est une chance pour instaurer un climat de confiance constructif. Le G 5 (le groupe des cinq présidents de Conseils départementaux normands) va donc se muer en G 6 avec le nouveau président du Conseil régional de Normandie. Le travail en commun, pendant toute une mandature, devrait montrer toute la pertinence et tout l’intérêt d’une telle cohérence, pouvant résister à un éventuel changement de majorité dans l’une de ces collectivités lors des prochaines élections départementales ou régionales. Ce serait le bon sens…
Dans le même temps, la Loi NOTRe pousse aux regroupements de communautés de communes et à la création de « communes nouvelles » par fusion de communes actuelles. Apparemment, cela se fait souvent dans la douleur : le localisme sévit toujours. Mais quand on fera le bilan, on s’apercevra que la géographie administrative de la Normandie (et de la France) aura évolué et que le mouvement ainsi encouragé porte ses fruits en matière de mutualisation et, là encore, de cohérence territoriale
Restent les graves problèmes auxquels la Normandie est confrontée. Citons-en quelques-uns :
Le journal Paris-Normandie de ce jour (29 décembre 2015) titre : « Il va manquer 700 médecins en Normandie ». Du fait de la démographie médicale et du non-remplacement des départs à la retraite. La Normandie est avec la région Nord-Pas-de-Calais – Picardie la plus mal lotie en la matière. Le problème n’est pas nouveau. Cela fait des années que le Mouvement Normand, par ses articles, ses communiqués, dénonce cette insécurité sanitaire dangereuse. Depuis le temps, on aurait pu remettre en cause le fameux « numerus clausus » qui limite la formation des futurs médecins. Pourra –t-on s’en sortir sans imposer l’installation temporaire (cinq ans, dix ans ?) des futurs médecins… là où il y a des malades ? Que l’on n’oublie pas qu’en France les études sont gratuites et que dans certaines professions (dans l’enseignement, par exemple), on impose des affectations à l’issue des concours ?
Le problème des infrastructures de communications (pas seulement ferroviaires) est le plus irritant car il aurait dû être réglé au cours du XXè siècle. (Merci la division de la Normandie !) et les perspectives en la matière sont calamiteuses, du fait de l’impécuniosité de l’Etat et des dettes de la SNCF et de RFF.
L’absence de compensations en faveur des ports de la Basse – Seine durement concurrencés par la réalisation prochaine du Canal Seine – Nord – Europe est un grave souci pour le devenir maritime de la Normandie.
Enfin le « Schéma stratégique de la Vallée de la Seine », tel qu’il est formulé aujourd’hui et « cornaqué » par les services du Premier ministre, risque de conduire à moyen terme à la disparition de la Normandie « utile » dans le grand fourre-tout du Bassin parisien.
Pour chacun de ces problèmes, la confrontation est inévitable avec l’Etat responsable de la mise en déshérence de la Normandie. Il faudra beaucoup de courage et de ténacité aux responsables politiques normands pour redresser la barre : des majorités d’idées sur ces thèmes devraient permettre à l’exécutif régional de sauvegarder les intérêts normands. Le Mouvement Normand en appelle à la responsabilité des élus : une région unanime peut en imposer aux volontés de l’Etat ou… à la mauvaise volonté de l’Etat.
La Normandie doit retrouver son dynamisme. Elle peut le faire si sa population prend conscience de toutes ses potentialités, réveillant une identité assoupie par des décennies de divisions administratives, retrouvant une fierté confortée par l’exaltation de la « marque Normandie ». C’est l’affaire de tous. C’est la tâche à laquelle s’attelle en priorité le Mouvement Normand.
A l’heure où nous écrivons ces lignes, nous ignorons le lieu où la nouvelle Préfète de région va convier les Elus pour « installer » le premier Conseil régional de Normandie. Attachés aux symboles identitaires significatifs, nous avons, au printemps dernier, été les premiers à souhaiter que cette cérémonie d’installation se fasse dans le cadre du Palais de Justice de Rouen, ancien siège du Parlement de Normandie : le fil serait ainsi renoués à plus de deux siècles de distance. La Normandie officielle et administrative a disparu lors de la Nuit du 4 août 1789 : elle va être recréée le 1er janvier 2016 et l’installation du Conseil régional de Normandie par la représentante de l’Etat en région se faisant dans les locaux vénérables de l’Ancien Parlement, cela aurait un sens très fort. Première étape de la promotion de l’identité normande et de la fierté normande retrouvée… Ce serait trop beau pour être vrai, sans doute. Dommage. La Normandie mériterait cette reconnaissance et cette réparation de l’injustice qu’elle a subie du fait de sa désastreuse division.
En attendant, deux faits significatifs doivent être relevés qui ternissent ces derniers jours de l’année.
La société qui exploite le nouveau terminal multimodal du Port du Havre est mise en redressement judiciaire. Pourquoi ? D’abord parce que cet équipement – qui a coûté 140 millions d’euros, construit sur 60 ha, au pied du Pont de Normandie – ne fonctionne pas à plein. Loin s’en faut. L’idée de transférer le trafic, notamment celui des conteneurs, directement des navires sur la voie ferrée ou sur la voie fluviale est bonne. Encore faut-il que l’emplacement choisi soit adéquat. Les bétonneurs du Grand Port Maritime n’ont pas écouté les usagers et ont réalisé la plate-forme multimodale en un lieu qui nécessite deux transferts de charge et l’on atteint difficilement la Seine puisque le Grand Canal maritime ne s’est pas fait sous la pression des écologistes… Et l’on s’étonnera que 80% du trafic du Port du Havre s’écoulent par la route ! Bonjour la production de CO2 ! C’est du gâchis.
Autre fait, ridicule à souhait, mais qui en dit long sur le dogmatisme de certains élus qui devraient s’exciter sur des questions plus importantes. Au Conseil départemental de Seine – Maritime, l’ancien président, Nicolas Rouly, lance la polémique : la commission permanente du département a décidé d’accorder une (modique) subvention à une Charité, celle de Roncherolles-en-Bray, qui a besoin d’un coup de pouce financier pour restaurer une bannière très ancienne et très usée… Au nom de la Loi de 1905 et de la laïcité, l’élu socialiste s’insurge : une Charité est une association cultuelle et « la République ne reconnaît, ni ne subventionne aucun culte ». Ce que l’ombrageux personnage oublie, c’est que les Charités sont tout à fait emblématiques de l’identité normande (comme les églises) et que objets de culte et meubles d’églises font partie du patrimoine. Il s’agit, en l’occurrence, de sauvegarder ET l’identité normande ET le patrimoine. Polémique dérisoire évidemment, mais qui en dit long sur le sectarisme de certains et le manque de hauteur de vues des responsables. Il y a la Loi, le respect de son principe et la manière de l’appliquer. C’est surtout une question d’intelligence…
Arrivé au terme de cette année 2015, j’adresse à tous nos correspondants et à tous les Normands, au nom du Mouvement Normand, de ses instances, en mon nom personnel, tous nos vœux pour la Nouvelle Année : qu’elle soit heureuse pour la Normandie, pour vous-mêmes et vos familles.
DIDIER PATTE
Président du Mouvement Normand