CAEN, PLACE de la REPUBLIQUE: Joël BRUNEAU, le maire, a vendu son droit d'aînesse pour un plat de lentilles...
Voilà! c'est fait! Délibération n°37 du conseil municipal de Caen réuni le 25 juin 2018 et votée vers minuit qui autorise la vente de plus de 5000m² d'un ci-devant parking public planté de tilleuls et situé au bout de la place de la République, à l'emplacement de l'ancien hôtel de ville détruit en 1944 et jamais reconstruit sur place depuis...
Le compromis de vente avec le contrat afférent assorti de "promesses synallagmatiques" qui engagent la ville de Caen jusqu'en 2027 a donc été adopté malgré les protestations vigoureuses de l'oppostion municipale: la parcelle autrefois dans le domaine public de la Ville de 1792 à... 2017 va donc être vendue au principal promoteur immobilier sur la place caennaise, un certain Malek Rezgui président de la société SEDELKA EUROPROM (associé dans cette triste aventure avec Laurent Chelma, directeur du grand magasin Le Printemps et dirigeant de la société JEL diffusion) pour la modique somme de 5,2 millions d'euros. Ce qui a fait dire à certains Caennais que les soldes avaient commencé en leur bonne ville avec deux jours d'avance sur la date officielle!
Cette décision risque d'avoir de lourdes conséquences, à commencer par des conséquences électorales en 2020: tronçonner des tilleuls dans leur verdure et tout en sève au coeur de l'été n'est pas la meilleure propagande politique que l'on puisse imaginer. Mais, Joël Bruneau, le maire de Caen comme beaucoup d'élus en France qui ont plus la fibre autoritaire que réellement démocratique, s'obstine à défendre un projet aussi inutile que vain en croyant être le despote éclairé de l'Athènes normande. Ce faisant, il commet deux grandes erreurs sinon trois:
1) Tel Esaü dans l'Ancien testament, il vient de vendre son droit d'aînesse pour un plat de lentilles...
2) Il tire les marrons du feu pour des gens qui n'oseront jamais se présenter devant les électeurs pour leur réclamer leurs suffrages ! Il serait vraiment dommage que Monsieur Bruneau se brûle totalement les mains d'ici 2020 car l'actuel maire de Caen, contrairement à certains de ses prédécesseurs, a parfaitement compris le rôle que l'agglomération de Caen doit jouer en Normandie.
3) Il commet, cependant, une faute lourde en terme de stratégie pour assurer l'attractivité et le rayonnement du centre ville de Caen à l'échelle de l'agglomération sinon de la Normandie toute entière: au lieu de vendre le potentiel caennais à un bétonneur sans âme ni imagination qui veut nous infliger un centre commercial de plus, le maire de Caen devrait parier résolument, de façon stratégique, volontariste, sur la culture et le patrimoine pour faire à nouveau de Caen une grande destination du tourisme culturel et patrimonial, ce que la ville de Trébutien fut jusqu'en... 1944.
Caen dispose depuis 2012 du précieux label "ville d'art et d'histoire" mais n'en fait quasiment rien.
Un Architecte des Bâtiments de France plutôt incompétent règne tristement sur le patrimoine de la ville. On annonce la venue prochaine d'une AVAP (aire de valorisation de l'architecture et du patrimoine) attendue comme Godot... Mais en attendant, tous les mauvais coups des promoteurs partent et l'ABF ne fait rien ou presque pour limiter les conséquences désastreuses d'un mauvais PLU.
Malgré les terribles destructions de la Guerre, le patrimoine architectural et artistique caennais reste de tout premier ordre avec le Château ducal, toujours aussi vide si ce n'est deux musées qui s'ignorent dans l'enceinte, la base d'un donjon perdue dans les herbes folles, des voitures sur le gravier d'un parking, une église St Georges transformée en vulgaire billetterie et une salle de l'Echiquier en échec: le château de Caen, actuellement, c'est plutôt assez nul mais on nous dit que ça va bientôt changer... Avec aussi de splendides églises, les deux grandes abbayes mausolées de Guillaume et de Mathilde, quelques rues et places anciennes encore charmantes et une architecture de la Reconstruction qui n'est pas aggressive et qui met en valeur les monuments.
Au lieu d'empiler les centres commerciaux et autres galeries marchandes comme les boîtes à chaussures un jour de soldes, Monsieur Bruneau devrait attirer les touristes par la culture et le patrimoine quitte à les faire venir depuis des bateaux de croisière qui peuvent accoster dans le port de Caen en proximité immédiate du centre ville.
Monsieur Bruneau n'est pas sans savoir, par exemple, que c'est précisément l'axe stratégique de développement mis en oeuvre par Frédéric Sanchez pour réveiller Rouen, la métropole normande:
Quartier des musées, restauration de l'aître Saint Maclou pour en faire un centre européen d'interprétation de l'art de la faïence, restauration à l'identique de tous les grands décors extérieurs de la cathédrale...
Restauration intégrale de la flèche d'Alavoine avec mise en lumière spectaculaire, ouverture de l'historial Jeanne d'arc, ouverture de la chapelle Corneille, auditorium régional, du Panorama XXL, requalification générale du plateau piéton dans le centre ville ancien, retour de l'Armada en 2019 des Impressionnistes en 2020 et, last but not least, la candidature de Rouen au titre de capitale européenne de la culture...
Des villes comme Bayeux, Honfleur, Bernay, Avranches voire Domfront dans l'Orne ont compris qu'il fallait faire du tourisme patrimonial et culturel une vraie stratégie de développement, une stratégie centrale: c'est la seule solution pour assurer le niveau de fréquentation suffisant pour faire vivre un centre ville qui ne doit pas être confondu avec un centre commerçant ou pire, un centre commercial...
La restauration intégrale du clocher de l'église Saint Pierre de Caen, c'est bien mais s'il n'y a pas en ville une exposition permanente, un musée de l'histoire de la ville pour expliquer au public le rôle joué dans le Monde entier par la pierre de Caen, cette restauration aura, en partie ratée sa cible avant que le clocher ne noircisse à nouveau sous l'effet de la pollution automobile.
Pendant ce temps-la, la tour Saint Romain de la cathédrale de Rouen carillonne pour le plus grand plaisir des habitants et des touristes. Il n'est pas prévu de mettre un carillon dans le clocher de l'église Saint Pierre: un mécène alors? Peut- être que MM. Rezgui et Chelma pourraient être enfin généreux envers une ville qui les soigne si bien!
Le maire de Caen risque donc de faire prendre un sérieux train de retard à sa ville et à ses habitants en laissant les promoteurs immobiliers piloter, de fait, la politique d'attractivité urbaine à sa place:
Le Général de Gaulle, lui-même, ne disait-il pas que "la politique de la France ne se décide par à la corbeille"?
Il devrait en être de même à Caen: la politique caennaise ne doit pas se décider au siège de SEDELKA EUROPROM, promenade de l'hippodrome mais bel et bien à l'abbaye aux Hommes jadis fondée par Guillaume le conquérant celui qui a crée, de fait, la ville de Caen...
Il y a, en effet, urgence à achever la reconstruction caennaise pour tourner définitivement la page de l'Après guerre, plus de 70 ans après l'urbicide libérateur de l'été 1944 en mettant l'accent sur la récupération de la qualité des espaces publics qui est le grand point faible caennais: c'est le grand enjeu, notamment de la place de la République que de pouvoir être, à nouveau, un espace public de haute qualité. Qualité qui nous est donnée par le patrimoine architectural subsistant et par le patrimoine végétal actuel (les tilleuls plantés dans les années 1950 constituent une sorte de "mémorial végétal" de l'ancien hôtel de ville disparu dans les bombardements.) Au lieu de défigurer et de dénaturer cruellement cette place par une "architecture" contemporaine totalement incongrue au service de fonctions urbaines on ne peut plus banales, sinon standardisées, des membres du collectif caennais qui se mobilise pour défendre la place de la République ont récemment proposé un projet alternatif certainement plus en accord avec l'esprit des lieux:
Parmi les propositions alternatives, outre celle de créer un grand parc public arboré d'entrée dans l'hyper centre piéton, l'idée de reconstruire à l'identique une partie de l'ancien portail monumental de l'hôtel de ville (ancienne chapelle des Eudistes).
La vente de la parcelle destinée à accueillir le projet République à Caen à deux sociétés locales a été votée ce lundi en conseil municipal à l’issue de débats animés avec l’opposition.
Nouvel acte dans le projet République. Le conseil municipal de Caen a adopté ce lundi soir la cession d’une parcelle située entre les rues Jean-Eudes, Saint-Laurent, Aubert et la place de la République au promoteur Secoprom et à la société Toscaleo conseil pour un montant de 5 200 000 €.
Cet espace accueillera notamment des halles gourmandes, un mini-centre commercial, un espace de coworking et 450 places de parking souterrain.
Cette cession s’accompagne d’un cahier des charges qui impose à l’opérateur d’exclure tout projet de logement ainsi que de toute surface de vente alimentaire supérieure à 1 500 m2. Et qui prévoit la création d’un comité d’enseignes qui examinera les candidatures des magasins pressentis pour s’installer sur ce nouveau site.
L’ensemble des élus d’opposition a voté contre la délibération.
Lire aussi : Caen. Projet République : 6 000 signatures contre la future place
Voir aussi la page suivante proposée par un blogueur caennais aussi impertinent que bien informé:
Commentaire de Florestan:
En effet, la question semble pertinente: c'est qui le maire de Caen?