Politique normande: pour exister au coeur de l'été, il faut secouer le marronnier ferroviaire...
Dans le jargon des journalistes, un "marronnier" c'est un sujet d'actualité convenu qui revient chaque année aux mêmes dates, bref! un produit de saison quelque peu formaté, une figure imposée de l'actualité. C'est ainsi que nous avons, pour commencer l'été, les larmes et les cris des lycéens heureux bacheliers ou non, la qualité des eaux de baignade, le chassé-croisé entre juilletistes et aoûtiens, la victoire d'étape d'un cycliste français au tour de France...
Marronniers d'été bien connus auxquels il faudra, hélas, ajouter l'arbre sec de la canicule, changement climatique oblige!
Derrière ces quelques marronniers nationaux, se cachent une forêt de marronniers locaux ou régionaux tels que la présence d'un bagad breton à une énième fête de la Mer, un rassemblement annuel de montgolfières sur une base aérienne de Lorraine, un reportage avec cigales bien sonores dans un marché provençal... Le journal de TF1 de 13 heures étant devenu depuis de nombreuses années, une sorte de conservatoire national de tous les marronniers de nos régions!
Et la Normandie, ne fait pas, bien entendu exception si l'on veut bien troquer un marronnier pour un pommier (ce qui revient médiatiquement au même): on pourrait se dire que le marronnier médiatique normand au coeur de l'été se tartine de crème (évidemment pas solaire) et qu'il a, forcément, toujours un petit côté... vache!
Que nenni!
Chez nous, le marronnier estival ne prend pas son bonheur dans le pré mais s'égare sur le quai des gares car, en toute saison, le marronnier des marronniers normands c'est le chemin de fer, le "tue- vaque" qui n'arrive jamais à l'heure a fortiori quand il s'agit de mettre en oeuvre les nouveaux horaires du matin pour partir au boulot d'ici quelques mois...
Bref! le marronnier estival normand n'a vraiment rien à voir avec les vacances!
On lira avec amusement l'article suivant de Paris-Normandie signé Stéphane Siret:
Polémique. Pas de trêve estivale pour la politique qui monte au créneau sur le sujet des nouveaux horaires des trains entre la Normandie et Paris.
C’est peu de dire que la future grille horaire des TER entre Paris et la Normandie, dévoilée en début de semaine dernière par la SNCF – elle entrera en vigueur en décembre – a, de loin, franchi les limites de la grogne d’usagers mécontents, qui vont devoir conjuguer avec des allongements de temps de trajet, des horaires décalés et des suppressions de trains à certaines heures de la journée.
À dessein ou non, la politique s’empare désormais du dossier. À sept mois et demi des échéances municipales (15-22 mars 2020).
Ainsi, les quatre parlementaires communistes de Normandie, tous élus de la Seine-Maritime (Céline Brulin, Sébastien Jumel, Jean-Paul Lecoq et Hubert Wulfranc) viennent de demander une rencontre avec Hervé Morin, le président de la Région Normandie, laquelle reprendra au 1er janvier 2020 la main sur les trains Intercités. Les quatre élus évoquent « une grande et légitime inquiétude » parmi les usagers mais aussi les élus.
La réunion entre les parlementaires communistes et le président centriste de la Région est programmée. Elle aura lieu le mardi 10 septembre prochain. Ni à Rouen ni à Caen, mais à Paris. Ce jour-là, les quatre élus entendent bien défendre bec et ongles les usagers. Et ils savent déjà ce que leur répondra le président de la Région qui leur a adressé en fin de semaine un long courrier, que Paris-Normandie s’est procuré et dans lequel il ne cache pas sa surprise que « des élus aussi informés, et pour telle ou tel d’entre vous, aussi proche de la Région [Céline Brulin est conseillère régionale de Normandie, NDLR] puissent croire ou laisser croire à une dégradation du service ferroviaire en Normandie ».
Selon Hervé Morin, le Plan transport qui sera soumis à l’assemblée régionale « avant la fin de l’année » prévoit une offre ferroviaire en hausse de « 20 % ». « Ce bond en avant est sans équivalent dans notre histoire ferroviaire », ajoute le président de la Région.
Mais quid de la suppression de trains ?
Hervé Morin « insiste » dans son courrier « sur le fait qu’au départ ou à destination de Rouen, aucun train n’est supprimé. Certains trains subissent toutefois des variations de l’ordre du quart d’heure et l’alternance des trains directs et semi-directs est modifiée, pour assurer une meilleure répartition horaire des trains à l’arrivée à Rouen le soir et améliorer la desserte de Vernon, où le nombre de navetteurs dépasse les 2 000 chaque jour. » Quant à l’allongement des temps de parcours, s’il est « incontestable », il est aussi « directement lié à plusieurs séries de travaux sur la ligne » et « n’est en rien imputable à la révision des grilles horaires ».
Autre inquiétude de la part des élus communistes, en particulier de l’ancien maire de Dieppe, Sébastien Jumel, la desserte de la ville portuaire. « Le nombre de trains reste inchangé, indique Hervé Morin, avec quinze allers et seize retours Dieppe-Rouen chaque jour, dont six allers-retours de desserte fine comme aujourd’hui ». À cela s’ajoute un aller-retour Paris-Dieppe sans correspondance à Rouen qui sera « rétabli » en 2020 « alors qu’il avait été supprimé par l’État et la SNCF, sans véritable réaction de la part de l’ancienne majorité régionale ».
Les élus communistes ne sont pas les seuls à monter au créneau sur la question ferroviaire qui, d’une année à l’autre, demeure toujours aussi sensible. Députée Agir-La droite constructive de la Seine-Maritime et conseillère départementale du Havre, Agnès Firmin Le Bodo a choisi d’escamoter Hervé Morin et Jean-Baptiste Gastinne, vice-président de la Région en charge des Transports et maire LR du Havre, pour s’adresser directement à Guillaume Pépy, le président de la SNCF.
Dans son courrier, elle lui fait part d’une « exaspération » voire d’une « colère qui grondent depuis plusieurs mois » et qui « se renforcent encore à la faveur de la présentation des nouveaux horaires sur la ligne Paris-Le Havre. » « L’exaspération des usagers est de plus en plus perceptible », assure l’élue. « Bien évidemment, ajoute-t-elle, les travaux prévus sur la Ligne nouvelle Paris-Normandie devraient améliorer les conditions de transport mais en attendant cette date (2025 ? 2030 ? plus tard ?), c’est leur quotidien qui devient de plus en plus difficile. »
Il y a presque dix ans au Havre, au printemps 2010, Guillaume Pépy avait assuré devant un large aréopage de décideurs normands réuni à l’occasion de la première grand-messe de l’axe Seine, que la SNCF avait « une dette » envers la Normandie. Au quotidien, les usagers savent que le chemin est encore long avant sa résorption totale... Reste aussi à savoir si la nouvelle grille horaire est gravée dans le marbre. En début de semaine, Jean-Baptiste Gastinne l’assurait : « On pourra modifier quelques horaires à la marge. »