EPR de Flamanville: un FIASCO ABSOLU alors que la Normandie de l'hydrogène est en train d'advenir...
L'EPR de Flamanville est un fiasco industriel et financier absolu. N'insistons pas sur les causes: la perte en ligne de compétences techniques n'est pas la seule. Il y a aussi le pilotage erratique d'EDF depuis plus de 15 ans selon des objectifs financiers de croissance externe comme s'il s'agissait d'une vulgaire multinationale alors qu'il en va de notre souveraineté énergétique. A cela ajoutons l'habituel désengagement de l'Etat et le mauvais temps idéologique européen contre tout ce qui peut apparaître comme un obstacle archaïque à la loi universelle du marché et de la concurrence: EDF est un service public d'Etat ayant trop bien réussi dans sa mission d'offrir partout et pour tous une électricité abondante et moins chère qu'ailleurs... Un avantage comparatif dont dispose encore la France et qui ne fait pas plaisir aux Ayatollah de la concurrence libre et non faussée de Bruxelles. Et pour compléter le tableau de cette politique de Gribouille (nous ne parlerons même pas des mirages africains de Madame Atomic Anne: Aréva / Orano...changer de nom ça ne suffit pas!), EDF se voit affublée d'un fardeau, à moins qu'il ne s'agisse d'une peine expiatoire, qui consiste à financer des alternatives énergétiques à l'électro-nucléaire qui ne sont guère efficientes et qui remplissent les poches d'opérateurs qui n'ont que faire de l'intérêt général énergétique de la France: on pensera, bien entendu, au fiasco de l'éolien terrestre qui vaut bien celui de l'EPR de Flamanville.
Tout cela est très regrettable, consternant et inquiétant car, quoiqu'en pensent les écologistes les plus idéologiques, nous avons besoin de l'électro-nucléaire qui n'émet pas de gaz carbonique dans l'atmosphère et qui couplé à un plan national hydrogène pour les transports serait la voie française pour accomplir l'indispensable transition écologique à accomplir avant... 2050!
Ajoutons enfin qu'avoir dépensé en vain ou presque près de... 12 MILLIARDS pour cet EPR sur le sol de notre Normandie passablement méprisée ces dernières années par les grands investissements publics structurant de l'avenir, avive notre colère normande!
Mais aussi notre inquiétude:
L'unité d'EDF est menacée par le plan dit "Hercule" avec un EDF "bleu" électro-nucléaire financièrement dans le rouge, une sorte de Crédit Lyonnais énergétique, qui prendra son temps pour être apuré... et un EDF "vert" comme la couleur du billet destiné, à terme, à la privatisation avec les filières des énergies renouvelables.
Dans cette aventure, la Normandie est totalement ou presque plongée dans l'EDF bleu avec ses centrales de Flamanville, Penly et Paluel mais aussi avec sa poubelle nationale des déchets radioactifs de la Hague: le maintien de la filière nucléaire normande sur des bases techniques maîtrisées et éprouvées (l'EPR est un projet inutile et mal conçu alors que le projet Astrid abandonné discrètement cet été qui ambitionnait de recycler dans les centrales nucléaires des barres au plutonium pour limiter l'impact des déchets radioactifs était une piste plus intéressante...) est une nécessité pour développer la Normandie de l'hydrogène notamment dans les transports: en effet, la pile à l'hydrogène apparaît, de plus en plus, comme une alternative crédible au moteur thermique classique aux hydrocarbures, plus pertinente écologiquement que la pile électrique au lithium qui génère des dégâts considérables dans l'extraction des terres rares, monopole chinois (un de plus...) et qui est difficilement recyclable. Mais pour fabriquer de l'hydrogène, il faut procéder à l'electrolyse de l'eau qui demande une source énergétique abondante en électricité: cette source nous l'avons, c'est l'électro-nucléaire.
Revue de presse:
INDUSTRIE. Le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, et le président-directeur général d'EDF, Jean-Bernard Lévy, se sont vu remettre ce 28 octobre 2019 un rapport portant sur la construction de l'EPR de Flamanville et ses nombreuses difficultés. Le document pointe du doigt une filière nucléaire française en proie à "une certaine déliquescence".
"Un manque de rigueur inacceptable."
Les responsables politiques n'ont pas fait dans la dentelle ce 28 octobre 2019 : Jean-Martin Folz, ancien président-directeur général du groupe automobile PSA, a rendu ce jour un rapport portant sur la construction de l'EPR de Flamanville, dans la Manche, au PDG d'EDF, Jean-Bernard Lévy, ainsi qu'au ministre de l'Economie et des Finances, Bruno Le Maire. Pour rappel, le patron de l'énergéticien avait commandé ce rapport en juillet dernier pour effectuer "une analyse des raisons qui avaient conduit au choix de l'EPR, des causes des retards successifs et des écarts entre les prévisions initiales et les coûts à terminaison de la construction de ce réacteur" à eau pressurisée de nouvelle génération. Et pour cause: la facture finale du chantier est passée de 3,3 milliards d'euros en mai 2006, à 12,4 milliards en octobre 2019. Quant à la date de livraison de la centrale, elle a été repoussée de juin 2012 (pour la mise en service industrielle) à fin 2022 pour le chargement du combustible nucléaire.
"Une estimation initiale irréaliste", "une gouvernance de projet inappropriée", "des équipes de projet à la peine", "des études insuffisamment avancées au lancement", "des relations insatisfaisantes avec les entreprises", "une perte de compétences généralisée"... Le rapport de Jean-Martin Folz n'y va pas par quatre chemins et dresse un portrait au vitriol de la filière nucléaire tricolore, dénonçant "une certaine déliquescence de la filière au cours des années". "Nous avons trop cru au contrôle et pas assez à la prestation de qualité", a estimé l'ancien patron de PSA. Le Gouvernement, qui a rappelé qu'EDF était détenue à hauteur de 83% par la puissance publique, en a pris acte : pour Bruno Le Maire, le chantier de Flamanville témoigne d'un "manque de rigueur inacceptable", illustrant des "problèmes de compétences et de structuration de la filière".
Aux yeux du locataire de Bercy, "des progrès importants restent à faire", et il s'agit d'en "tirer toutes les conséquences". "La filière nucléaire doit se resaisir", a prévenu le ministre de l'Economie, qui a demandé à Jean-Bernard Lévy de mettre en oeuvre un plan d'actions, basé sur le rapport, et divisé en 6 axes : "la gouvernance des grands projets d'EDF", "l'amélioration de la coordination entre EDF et Framatome pour parvenir à une intégration industrielle de la plus haute qualité", "un dialogue plus étroit entre l'Autorité de sûreté nucléaire et EDF pour que notre niveau de construction soit au niveau de nos exigences de sûreté en exploitation", "un plan de compétences de la filière nucléaire, portant notamment sur les métiers critiques comme les soudeurs [en référence aux anomalies techniques constatées sur des soudures de générateurs de vapeur sur différents réacteurs, ndlr]", "l'établissement des responsabilités tout au long de la chaîne de production qui pourront conduire à une réorganisation des équipes", "la prise en compte du retour d'expérience de Flamanville 3 sur les projets à l'exportation, en particulier Hinkley Point [en Grande-Bretagne, ndlr]". Un plan d'actions que le PDG du groupe doit rendre dans un mois, sachant qu'un point d'étape doit être effectué fin 2020 pour préparer les décisions du président de la République sur le nucléaire français.
"Un constat d'échec" pour un secteur industriel plombé par les anciennes rivalités entre EDF et Areva
Le patron de l'énergéticien prend toutefois ses responsabilités : "C'est une réalité, la filière nucléaire française traverse des moments difficiles. C'est un constat d'échec que je partage. Mais nous allons redoubler d'efforts. Ma responsabilité est de rehausser le niveau de compétences." Soulignant que le secteur avait été plombé par les rivalités entre EDF et Areva (devenue depuis Framatome), Jean-Bernard Lévy a précisé que la création, en 2017, de la filiale Edvance devait justement regrouper les compétences en ingénierie des équipes de l'énergéticien et du constructeur d'équipements atomiques pour unifier la filière et ne plus tomber dans les mêmes travers. En 2018, la création du Gifen, le Groupement des industriels français de l'énergie nucléaire, a aussi été motivée par cette volonté de simplification et de clarification : 190 grands donneurs d'ordre, grands groupes, ETI, TPE-PME, micro-entreprises et associations sont rassemblés dans cette structure pour soutenir le développement économique, valoriser les savoir-faire et renforcer la visibilité de l'industrie atomique française.
Pas question pour autant de dénigrer l'énergie nucléaire : mettant en avant les deux EPR de la centrale de Taishan, en Chine, qui fonctionnent depuis plusieurs mois sans rencontrer le moindre problème, Jean-Bernard Lévy confirme au Gouvernement qu'il a bien "l'intention de [lui] présenter un plan d'actions d'ici un mois" : "La technologie EPR est éprouvée. Elle fonctionne bien depuis un an à Taishan, et répond plus globalement aux besoins de beaucoup de pays. C'est aujourd'hui le réacteur nucléaire le plus puissant au monde." Car l'atome reste aujourd'hui indispensable : "Nous avons plus que jamais besoin du nucléaire pour la transition énergétique. Une part substantielle d'électricité d'origine nucléaire devra faire partie du mix énergétique mondial si l'on veut atteindre les objectifs bas-carbone."
L'exécutif espère avoir toutes les cartes en main à la mi-2021:
Tandis qu'Elisabeth Borne espère être en possession de l'ensemble des études sur le sujet à la mi-2021, Bruno Le Maire remet les points sur les "i" : "Il n'y a qu'un seul Etat, et il joue son rôle. Il ne peut pas y avoir d'Etat dans l'Etat. [En référence à ses propos quelques jours auparavant sur le rôle et la place d'EDF, ndlr.] Nous avons confiance en EDF et en Jean-Bernard Lévy pour redresser la barre." Et d'assurer que le rapport de Jean-Martin Folz ne sera pas un énième rapport de plus empilé sur une étagère : "C'est un exercice de rupture et il est assumé comme tel. C'est un exercice sans précédents dans sa transparence et dans ses ambitions, et il est assumé comme tel, pour remettre la filière nucléaire française au niveau d'exigences auquel elle doit être." Si l'orage commence à gronder pour EDF, Jean-Bernard Lévy a maintenant un mois devant lui pour dissiper les nuages.
Voir par ailleurs: