La décentralisation régionale: la dernière chance d'Emmanuel Macron? Oui ! Mais...
... A condition de prendre l'idée de région au sérieux!
Malheureusement ce n'est pas le cas car le concept de "région" reste flou pour définir une échelle territoriale intermédiaire entre le local et le national sans compter avec la confusion toujours faite entre espace fonctionnel et territoire approprié (espace vécu "enraciné"), entre région et découpage territorial... Sans compter avec la concurrence toujours prête à repartir entre les régions et les départements, a fortiori, lorsque ces derniers sont noyés dans des découpages néo-régionaux trop vastes et donc trop artificiels.
La solution de bon sens, si l'on devait traiter avec sérieux ce sujet et mettre en oeuvre une géographie utile et efficace d'une décentralisation régionale authentique serait d'ajuster au mieux la fonctionalité institutionnelle contemporaine (une collectivité territoriale d'action publique) à la géo-histoire du temps long de la province: le maillage départemental de 1790 respectant, dans les grandes lignes, la mémoire géo-historique millénaire de la France, aurait dû servir de base à la réforme régionale de 2015 qui, en ignorant cette évidence, a créé des monstres territoriaux sans réelle efficacité ni identité véritable à la très notable exception de la Normandie.
A partir de la maille départementale il eut été pertinent d'associer plusieurs départements pour recréer nos régions-provinces: la Normandie a, ainsi, été restaurée dans son unité. La Bretagne toujours pas... Comme il eut été pertinent de fusionner deux ou trois départements pour retrouver la province géo-historique sous-jacente: Savoie, Berry, Dauphiné, Poitou, Gascogne... ne demanderaient qu'à renaître sur la base d'un sentiment d'appartenance fortement partagé des habitants.
Il semble donc illusoire de vouloir définir un contenu (un surcroît de décentralisation?) sans avoir réellement pensé le contenant (la géographie régionale).
Et c'est d'autant plus illusoire qu'une fois de plus, la question de la décentralisation régionale est politiquement instrumentalisée par tous ceux qui ne s'en soucient guère sauf lorsqu'ils y sont contraints par les aléas de leur carrière politique: la question régionale ne fait pas encore l'objet d'une pleine incarnation avec un personnel politique qui lui serait entièrement dédiée à l'instar de la scène politique nationale (par ex: les parlementaires et les ministres du gouvernement) ou locale (les maires) mais on notera que c'est en train de changer avec quelques fortes personnalités qui arrivent à faire exister la question régionale dans le débat médiatique national ou qui, plutôt, existent au niveau national parce qu'ils incarnent une vraie région:
Hervé Morin associé à la Normandie, Gilles Siméoni pour la Corse ou Xavier Bertrand pour le Nord sont plus sûrement en train d'écrire l'avenir de la politique française que ne le font, actuellement, les députés d'une Assemblée nationale réduite à n'être que la chambre d'enregistrement du gouvernement.
Associée à un renouvèlement de la démocratie représentative par la démocratie délibérative directe au niveau local (par exemple en transformant certaines assemblées de caciques telles que les CESER en conventions citoyennes délibératives), l'idée régionale fondée sur de vraies régions (autrement dit, des "régions-provinces") serait la meilleure façon de soigner notre République prise d'un gros malaise d'abstention, symptôme d'une profonde mélancolie démocratique...
Malheureusement, ce qui est à lire ci-après ne va pas dans le bon sens, bien évidemement! Même s'il convient de faire feu de tout bois: Emmanuel Macron se souvient, enfin, du candidat du printemps 2017 qui nous annonçait un "pacte girondin"... Mieux vaut tard que jamais!
Mais s'il était possible de cesser de faire de la politique politicienne avec nos belles régions et nos belles provinces, ce serait tellement mieux...
(Marianne, n°1215 du 26 juin au 2 juillet 2020)
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Le président de l'Assemblée nationale s'est également prononcé contre un référendum sur les propositions de la Convention citoyenne sur le climat.
«Les collectivités locales représentent 75 % de l'investissement public, et on sait qu'une année électorale n'est jamais propice au lancement de grands projets. Or nous serons dans un contexte de relance économique. Il faudra choisir en cohérence la bonne réponse», a insisté ce proche d'Emmanuel Macron.
«Trouvons par le dialogue des méthodes plus apaisantes que le référendum»
L'ancien conseiller régional de Bretagne a notamment poussé en faveur d'une «décentralisation ascendante». «La France est diverse et il peut y avoir des modes d'organisation et des compétences différentes en fonction des territoires et de leurs projets (...) Sur la base de projets, le législateur peut accorder des compétences à des territoires.» L'ex-député du Finistère a même enjoint à aller« jusqu'au bout de ce qu'on peut faire, à Constitution constante».
Sur le climat, il n'a pas hésité à afficher ses réticences quant à l'organisation d'un référendum auquel l'Élysée réfléchit. «Rien n'est interdit mais la Constitution borne le référendum par ses articles 11 et 89. Trouvons par le dialogue des méthodes plus apaisantes que le référendum qui clive, mais qui peut parfois être un recours démocratique», a-t-il intimé au moment où 45 parlementaires réclament un grand projet de loi inspiré des 150 idées de la Convention citoyenne.
Voir enfin la réaction d'Hervé Morin dans la matinale de France2 (25 juin 2020):