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L'ETOILE de NORMANDIE, le webzine de l'unité normande
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22 juillet 2020

LE HAVRE: les Bretons et les Normands relancent la marine marchande à voile sous pavillon français...

Nous vous avions déjà récemment parlé de cette heureuse initiative de relancer la mythique route transatlantique du café entre l'Amérique et le grand port maritime normand du Havre au point d'écrire, avec celle des paquebots de la ligne Le Havre- New York,  l'une des plus brillantes pages de l'histoire de la marine marchande française:

http://normandie.canalblog.com/archives/2020/03/06/38078709.html

Les grands rassemblements de vieux grééments, notamment celui de l'Armada, se souviennent avec nostalgie de ces géants des mers, ces splendides cathédrales de toile qui sillonnaient, avec déjà de bien belles performances, les plaines océaniques.

Le peintre de marine normand Marin Marie avait d'ailleurs représenté les ultimes survivants de cette grande marine française marchande à la voile (pêche et commerce) dans les années 1920/1930 avant que la Seconde Guerre Mondiale ne provoque le basculement de toute la flotte de commerce dans la propulsion mécanique aux hydrocarbures ne laissant la voile au seul plaisir de la plaisance ou du sport: à cet égard, la marine à voile a subi le même sort que la traction hippomobile...

marinmarie

(Grand trois-mâts barque se présentant devant le port du Havre avec réception du pilote. Marin Marie, 1934)

Mais en raison des lourdes contraintes liées au changement climatique et à l'impérieuse transition énergétique qui en résulte, le monopole du tout moteur tout pétrole est aujourd'hui sérieusement remis en cause. L'avenir sera à une pluralité de modes propulsifs avec pour objectif d'atteindre l'absence totale d'émissions polluantes dans l'atmosphère. Sont sur les rangs: la propulsion au GPL, à l'hydrogène, à l'électro-nucléaire et désormais... le retour de la marine marchande à la voile!

Cette dernière se présente idéalement pour les entreprises commerciales travaillant sur des marchés de niche de haute qualité quant aux standards exigés par la clientèle recherchée: la marine à voile par la nostalgie qu'elle suscite et par l'absence de toute émission polluante dans l'air et dans la mer, devient le mode de transport idéal avec des capacités d'emport, certes, modestes mais qui sont celles en usage pour des marchés de niche (par exemple, produits de luxe).

On notera (pour nous en amuser) que la marine marchande à voile fait dorénavant rêver les bobos-écolos de nos centre-villes pour transporter d'Afrique et d'Amérique le meilleur de notre café et de notre chocolat alors qu'il y a deux siècles, l'importation en droiture de ces précieuses denrées vers nos ports atlantiques était la dernière étape d'un commerce dit "triangulaire" aujourd'hui honni puisque les deux premiers côtés du triangle étaient ceux d'un odieux trafic humain poursuivi jusqu'aux années 1815/1848 qui virent pour la France (pionnière en la matière on ne le dira jamais assez!) l'interdiction du "trafic de bois d'ébène" puis l'abolition définitive de l'esclavage dans toutes nos colonies.

Avec la confirmation de l'Entente cordiale entre la France et l'Angleterre après 1830, la route de l'Atlantique s'ouvre totalement pour les ports français ou plutôt pour nos ports normands du Havre, Rouen et Cherbourg: Marseille se spécialisant sur nos liaisons avec l'Algérie française et l'Orient. Le Havre devient même notre principal port américain laissant, loin derrière lui, les ports historiques de Nantes et de Bordeaux, ports de fond d'estuaire aux capacités nautiques réduites et plus éloignés de la région parisienne.

Le Bélem est, aujourd'hui, l'ultime témoin historique encore actif à la mer, de cette dernière époque de la marine marchande à la voile: construit en 1896 pour le compte d'un armateur nantais, ce cargo à voiles (aux belles lignes fluides héritées des clippers des années 1820/1840 eux-mêmes fiers héritiers des frégates du XVIIIe siècle), fut d'abord affecté au transport des fèves de cacao du Brésil vers la France.

bélem

C'est précisément ce que l'armateur breton s'apprête à faire de nouveau, plus d'un siècle après, à partir de l'Afrique avec un navire inspiré des grands trois-mâts barques du passé mais gréé de façon contemporaine (gréément "bermudien" qui s'est généralisé à partir des années 1960 dans la voile de plaisance sportive). Ce prototype s'inspire bien évidemment, d'un voilier mythique, le fameux "Club Méditerranée" lancé en 1976 pour Alain Colas qui arrivera avec ce voilier de 72 mètres de long gréé de... quatre mâts de 30 mètres de haut portant 1000 mètres carrés de toile, à la 5ème place de la Transat anglaise en... solitaire!

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https://www.bateaux.com/article/25504/club-mediterranee-pari-fou-d-un-voilier-de-72-m-un-homme-seul

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https://actu.fr/bretagne/douarnenez_29046/douarnenez-towt-lance-la-construction-de-son-voilier-cargo_35064523.html

Le futur voilier, dessiné par un cabinet d'architectes navals nantais fera 78,40 mètres de long (hors-tout) et pourra naviguer jusqu'à 12 noeuds en pleine charge avec une capacité d'emport de 1000 palettes de sacs de cacao ou de café.

Le navire pourra être entièrement déchargé en 5 heures. Une flottille de quatre voiliers est programmée pour ouvrir des lignes commerciales avec l'Afrique et l'Amérique du Nord et du Sud ainsi qu'avec les Antilles depuis le port normand du Havre.

On notera avec intérêt que cette entreprise bretonne présidée par un certain Guillaume Le Grand (eh oui! ça ne s'invente pas!) qui a le sens des réalités commerciales a décidé d'expérimenter cette aventure non pas depuis le port de Douarnenez ou celui de Nantes- Saint-Nazaire mais depuis le grand port maritime normand du Havre en raison du fait que nos ports normands  ont réussi à conserver un rôle éminent au niveau européen dans l'importation du café haut de gamme (Le Havre) et du cacao (Rouen, où  rappelons-le une fameuse pâte à tartiner au goût de noisette est toujours fabriquée...). En lisant l'article on verra avec satisfaction que le cacao importé par cette nouvelle marine marchande bretonne via notre grand port normand sera transformé dans une chocolaterie normande, celle de Tinchebray dans l'Orne.

On peut donc être que satisfait de ce projet en espérant qu'il va pouvoir être mis en oeuvre comme prévu malgré la crise actuelle provoquée par le coronavirus.

Un regret cependant: qu'un tel armement alternatif à la voile ne puisse pas exister aussi depuis la Normandie avec des entrepreneurs normands.

Si l'opération, pour l'instant expérimentale, démontre sa viabilité financière, on pourrait donc avoir l'espoir de voir se développer des petits armements à voile combinant les frets (marchandises et passagers) sur des distances courtes (cabotage transmanche ou entre des îles et le continent) ce qui, d'une certaine façon, serait le grand retour de réalités maritimes qui existaient de façon massive il y a encore moins d'un siècle lorsque les transports terrestres motorisés au tout pétrole n'avaient encore imposé leur dictature totalitaire sur le système des transports.

Dans la perspective de transports décarbonnés de proximité, un marché important du cabotage maritime à la voile (ou tout autre propulsion alternative au moteur aux hydrocarbures) s'ouvre à nouveau à partir de nos côtes: les régions maritimes françaises retrouveraient ainsi une part de leur vocation géographique et historique, à commencer par la Bretagne ET la Normandie!

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https://actu.fr/normandie/le-havre_76351/en-2022-le-cacao-cemoi-traversera-l-ocean-en-cargo-a-voiles-direction-le-port-du-havre_35071018.html

En 2022, le cacao Cémoi traversera l’océan en cargo à voiles, direction le port du Havre

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Acheminé par la compagnie bretonne TOWT, le cacao de l'entreprise Cémoi prendra, dès 2022, la mer par voiliers-cargos pour un périple depuis la Côte-d'Ivoire jusqu'au Havre.

Pour acheminer « ses meilleurs cacaos » depuis la Côte-d’Ivoire jusque dans le port du Havre (Seine-Maritime), l’entreprise Cémoi, leader du chocolat en France, a fait un ambitieux pari : celui du transport à voile. En ce mois de juillet 2020, elle a signé un contrat avec TOWT, transporteur breton qui développe des voiliers-cargos.

Lire aussi : Les marchandises transiteront bientôt du Havre vers l’Amérique du Sud… en cargo à voiles !

150 g de CO2 en mois par tablette de chocolat

Insolite sur le papier, ce mode de transport devrait pourtant voir le jour en 2022, date à laquelle la première ligne régulière en partance de la cité océane devrait voir le jour. Capable de transporter jusqu’à 1 000 tonnes de marchandises à la seule force du vent, le cargo à voiles séduit donc un client de poids.

Le géant du chocolat, qui développe avec « Transparence Cacao », entend bien jouer sur l’étiquette durable et responsable que présente ce transport de marchandises sans émission carbone. 

La solution de voilier-cargo développée par Towt permettra d’économiser 1 500 tonnes de CO2 par trajet, soit environ 150 g équivalent CO2 par tablette de chocolat ! 

15 % du cacao du chocolatier à terme

Profitant de la saisonnalité des vents de secteur Nord-Est, qui correspond à celle des récoltes du cacao, Towt devrait ainsi pouvoir acheminer la production jusqu’au Havre en une quinzaine de jours de traversée sans escale, quand les cargos classiques, contraints à différents arrêts, affichent eux des temps de parcours plutôt autour de trois semaines. 

Dès 2022, le chocolatier remplira les cales à deux reprises, puis à quatre en 2023 pour arriver à terme à près de 12 000 tonnes de cacao par an, soit près de 15 % du cacao utilisé annuellement par le chocolatier.

Arrivant d’Abidjan et déchargé au Havre, le cacao restera ensuite en Normandie puisque c’est dans l’Orne, à Tinchebray, que le chocolat sera ensuite fabriqué.


 Voir aussi:

http://www.journalmarinemarchande.eu/actualite/shipping/towt-lance-un-appel-doffres-pour-quatre-cargos-a-voile

https://france3-regions.francetvinfo.fr/transport-maritime-vent-pourrait-devenir-carburant-du-futur-1825546.html

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Commentaires
L
@Barreau : Oui, mais les bretons font mander les marins à bord sur les bateaux.
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B
vous avez l'air étonné, moi pas: les bretons ont le sens des réalités commerciales.<br /> <br /> Ils n’hésitent pas à se servir des voisins (ici en l’occurrence la Normandie) quand ils n'ont pas les infrastructures suffisantes chez eux. L'important c'est qu'ils rayonnent et qu'ils empochent les dividendes (ex Brittany ferries). Ils leur faut des benêts ou des faibles (mot valable pour les normands) pour les mettre en valeur.
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