Pourquoi avoir implanté un EPR en Normandie? Réponse: pour respecter le "Pacte Electrique Breton"
Un lecteur assidu de l'Etoile de Normandie quelque peu fouineur dans diverses archives quelque peu oubliées a trouvé l'information suivante qui confirmera sans peine ce que nous savions déjà tous ici:
La Normandie coupée en deux des années durant a subi un aménagement de type colonial de la part d'un Etat central arbitrant sur le territoire normand des priorités soi-disant nationales au détriment d'un intérêt général normand qui, en raison de la division normande en deux petites régions trop faibles pour peser et trop antagonistes pour s'organiser ou coopérer, ne pouvait pas exister dans les politiques publiques.
Concrètement, de 1956 à 2015, l'intérêt national en Normandie ce fut, avant tout, l'intérêt de la région parisienne dans l'ex Haute et l'intérêt de la Bretagne dans l'ex Basse.
La Normandie enfin réunifiée et qui affirme, avec une certaine vigueur depuis cinq ans seulement, des politiques publiques régionales au service d'un intérêt général authentiquement normand doit sans cesse démontrer son utilité pour l'intérêt national de la France (la Normandie, première région industrielle et maritime du pays, seconde région agro-alimentaire du pays, troisième région de production énergétique du pays, et aussi: première région française au titre du patrimoine mondial classé à l'UNESCO...) tout en gérant le lourd passif de la division.
Cependant, sur la question devenue essentielle de l'énergie en ces temps d'effet de serre, de changement climatique et de transition énergétique, le fait que la Normandie a été chargée du fardeau électro-nucléaire pour le profit d'une région voisne qui l'avait refusé bruyamment, ne doit plus être considéré comme un inconvénient mais plutôt comme une opportunité:
En effet, la production électrique nucléaire a le double avantage de nous proposer une électricité abondante à un prix modique et totalement... décarbonnée: en conséquence, la Normandie peut devenir LA région française de la transition énergétique en fabriquant abondamment l'hydrogène dont tout le monde va avoir besoin pour décarbonner massivement et rapidement la totalité de notre système de transports qui est le premier responsable de l'émission des gaz à effet de serre et de la pollution atmosphérique.
Reste, cependant, une condition sur laquelle les Normands vont devoir forcer leur nature pour être fermes comme les Bretons:
La Normandie qui est la région de France la plus équipée en réacteurs nucléaires (à Flamanville, Penly et Paluel) qui accueille un EPR prototype raté à plus de... 11 MILLIARD l'unité, qui pourrait en accueillir un second sur le site de la centrale de Penly, qui accueillle tous les déchets nucléaires du pays sur son site de la Hague, qui est censée accueillir quatre parcs d'éoliennes au large de ses côtes, ne peut plus accueillir chez elle TOUS LES INCONVENIENTS de la politique énergétique nationale!
Trop c'est trop!
Précisément, sur la question des déchets nucléaires et sur la question éolienne (une technique qui n'a pas fait la preuve de son efficacité industrielle et énergétique), le fardeau des Normands doit être partagé équitablement avec les autres régions françaises!
Concrètement:
Hervé Morin qui souhaite non sans raison l'implantation d'un second EPR en Normandie devrait assortir ce projet du REFUS de transformer l'usine Cogéma-Orano de La Hague en poubelle nucléaire nationale et du REFUS d'implanter des champs éoliens qui massacrent nos paysages patrimoniaux et qui pourraient aussi détruire notre littoral ainsi que notre pêche artisanale...
Trop c'est trop... Avec un jeu de cartes, on comprendra mieux pourquoi...
Pourquoi avoir voulu implanter un EPR en Normandie ?
Dans " Les évolutions récentes du système de production d'électricité français : les défis de la transition énergétique "
Michel Deshaies
Dans L'Information géographique 2014/4 (Vol. 78), pages 6 à 26
https://www.cairn.info/revue-l-information-geographique-2014-4-page-6.htm
On peut lire ceci :
" .../...
Le défi des pointes de consommation
Si la production annuelle d’électricité est largement excédentaire par rapport à la consommation, il existe pourtant de plus en plus de situations où le système de production français ne suffit pas à répondre à la demande et en conséquence il est nécessaire d’importer du courant des pays voisins. Les évolutions de la consommation sont à l’origine d’une amplification continuelle des pointes de consommation hivernales et des écarts saisonniers entre l’hiver et l’été.
Depuis 2001, les maxima annuels de consommation sont devenus presque chaque année de plus en plus élevés, passant de 79 590 MW en 2001 au record absolu de 102 100 MW enregistré le 8 février 2012 (tableau 2, RTE, 2013). Si ce dernier record est lié directement à l’une des plus sévères vagues de froid observées au cours des trente dernières années, il n’en reste pas moins vrai que l’amplification des maxima de consommation est une tendance lourde due à la part importante du chauffage électrique dans les logements neufs, ainsi que dans les locaux tertiaires. Il en résulte une forte sensibilité aux variations de température hivernales, en croissance continuelle au cours des années 2000. Selon RTE (2013) cette thermo-sensibilité serait actuellement de l’ordre de 2 400 MW (soit deux tranches nucléaires) supplémentaires par degré Celsius de baisse de température.
Les pointes de consommation hivernales représentent désormais plus de 85 % de la puissance installée totale en nucléaire, thermique et hydroélectricité qui sont seules capables de répondre à la demande au moment voulu. Lors de ces vagues de froid, le système électrique français est alors sous tension et pour répondre à la demande, il est nécessaire d’importer de plus en plus de courant électrique des pays voisins disposant de capacités thermiques (Allemagne) ou hydroélectriques (Suisse, Autriche) disponibles. Il est cependant parfois compliqué de trouver ces capacités supplémentaires, notamment lors d’une vague de froid particulièrement importante, affectant l’ensemble de l’Europe centrale et occidentale.
De plus, la croissance de la consommation dans le résidentiel, qui est pour l’essentiel responsable de cette évolution, a été très marquée dans les régions de l’Ouest, du Sud-Ouest et du Sud-Est, où les capacités de production électrique sont les plus limitées. La Bretagne, dépourvue de toute centrale nucléaire ou de centrale thermique importante et qui ne produit que 10 % de sa consommation, est la plus concernée par ce problème. D’où la nécessité de dispositifs d’effacement de la consommation mis en place par RTE, en partenariat avec certains gros consommateurs industriels et tertiaires, ainsi qu’avec des consommateurs individuels dans les régions les plus menacées par une rupture d’approvisionnement.
Dans le cadre du Pacte électrique breton, RTE a ainsi lancé durant l’hiver 2012-2013, une expérimentation auprès de consommateurs industriels afin qu’ils utilisent leurs groupes électriques de secours pendant les périodes de pointe de consommation. Ce dispositif reconduit durant l’hiver 2013-2014 permet de disposer de plus de 70 MW de capacité d’effacement. À cela s’ajoutent les dispositifs EcoWatt Bretagne (www.ecowatt-bretagne.fr) et Provence Azur, devenus en 2013 Ecowatt PACA (www.ecowatt-paca.fr), qui incitent les consommateurs inscrits et informés par internet ou par les réseaux sociaux, à modérer leur consommation pendant les heures de pointe hivernales, signalées par des alertes orange. Plus de 50 000 EcoW’acteurs sont inscrits en Bretagne et environ 20 000 en région PACA (RTE, 2013).
Ces volumes d’effacement qui peuvent représenter actuellement quelques centaines de MW, soit 2 à 3 % de la pointe de consommation dans les régions concernées, apparaissent encore bien insuffisants. Aussi, RTE va-t-elle mettre en place pour l’hiver 2016-2017, un mécanisme par lequel les fournisseurs d’électricité doivent acquérir des « garanties de capacité », afin de permettre l’approvisionnement de leurs clients lors des pointes de consommation.
Tel qu’il fonctionne actuellement, le système de production électrique présente une situation paradoxale, avec des exportations massives sur l’année, mais une capacité insuffisante pour répondre aux pointes de consommation hivernales. Le système électrique est donc amené à évoluer dans un cadre d’autant plus contraint que les impératifs environnementaux sont de plus en plus pris en compte et ont conduit à la mise en place d’une politique de développement des énergies renouvelables. .../... "
Zoom sur quelques phrases :
1. " la croissance de la consommation dans le résidentiel, ..., a été très marquée dans les régions de l’Ouest, du Sud-Ouest et du Sud-Est, où les capacités de production électrique sont les plus limitées. La Bretagne, dépourvue de toute centrale nucléaire ou de centrale thermique importante et qui ne produit que 10 % de sa consommation, est la plus concernée par ce problème. D’où la nécessité de dispositifs d’effacement de la consommation mis en place par RTE, en partenariat avec certains gros consommateurs industriels et tertiaires, ainsi qu’avec des consommateurs individuels dans les régions les plus menacées par une rupture d’approvisionnement. "
N'y avait-il pas lieu d'implanter un EPR en Bretagne plutôt que de l'ajouter à d'autres centrales nucléaires déjà implantées en Normandie ?!
2. Dans le cadre du Pacte électrique breton, RTE a ainsi lancé durant l’hiver 2012-2013, une expérimentation auprès de consommateurs industriels afin qu’ils utilisent leurs groupes électriques de secours pendant les périodes de pointe de consommation.
Alors qu'on fustige la production d'électricité par des centrales thermiques au charbon et au fuel, pendant les périodes de pointes de consommation, on compte sur des groupes électriques de secours d'industriels (thermiques !)... pendant les pointes de consommation bretonnes...
Commentaire de Florestan:
Merci qui?
Merci à la Normandie!