Logique! L'avenir du port du Havre sur la mer se trouve dans le développement d'une souveraineté logistique à terre...
On connaît la formule répétée à l'envi dans les grands colloques consacrés au développement de l'Axe Seine depuis dix ans maintenant: "la bataille des ports se gagne à terre". Effectivement c'est par la mise en oeuvre d'une logistique terrestre efficace depuis l'amont immédiat du port jusqu'à la boucle finale la plus lointaine qu'un grand port maritime préserve ses parts de marché et donc ses escales maritimes.
Le grand port maritime du Havre qui est le seul véritable grand port maritime français avec celui de Marseille se trouve depuis des années dans une situation paradoxale:
1) Celle d'offrir l'une des meilleures escales mondiales en terme de qualité nautique et technique d'accueil des navires et de rapidité de déchargement.
2) Celle d'être affublé d'une organisation et d'infrastructures logistiques terrestres à ce point inadaptée et défaillante que le GPM du Havre ne peut physiquement pas procéder au déchargement et au dépotage intégral des 18000 à 21000 EVP qui font pourtant escale sans peine dans la darse de Port 2000: ces géants des mers se voient allégés de 10 à 30% tout au plus de leur cargaison par les dockers et manutentionnaires du grand port maritime normand. Faute de pouvoir tout évacuer et de tout absorber, le géant des mers repart bien vite du Havre, double le cap de la Hève pour se faire décharger totalement du reste sinon du principal à Anvers, Rotterdam ou Hambourg là où la logistique terrestre mais aussi fluviale est solidement branchée sur le port avec des développements importants en matière de valeur ajoutée apportée aux marchandises manutentionnées qui font que la logistique ne consiste plus seulement à transporter des conteneurs sur des remorques routières tractées par des camions polluants ou à regarder passer comme nos vaches placides lesdits camions encombrer nos routes.
Néanmoins, depuis quelques années que l'on parle du sujet de remonter le niveau et la qualité de la chaîne logistique normande, notamment en ouvrant des entrepôts où les marchandises peuvent être triées, reconditionnées, achevées ou préparées pour leur livraison finale, les choses concrètement évoluent avec le développement assez spectaculaire de l'immobilier de l'entreposage logistique sur les terres pleins disponibles du grand port maritime du Havre.
Certes, Le Havre n'est pas encore au niveau d'égaler la puissance organisationnelle du "gateway" logistique du port, de la ville et de la région d'Anvers qui fonctionnent comme un réseau logistique complet très diversifié, totalement intégré, très innovant avec une redoutable efficacité commerciale pour démarcher de nouveaux clients au bout d'un hinterland qui s'étend désormais jusqu'à Paris ou Lyon pour ce qui concerne la France. Les logisticiens flamands sont, par exemple, capable de proposer un forfait logistique tout compris du déchargement du conteneur dans le port jusqu'au dernier kilomètre de la livraison en maîtrisant les différents modes et en limitant au maximum les ruptures de charges et tous les transports inutiles.
Mais il faut admettre que les choses vont enfin dans le bon sens au Havre: un acteur local s'y emploie fortement depuis maintenant quelques années, à savoir le groupe d'experts "Seine solutions" emmené par le logisticien normand Marc Ligot qui a été récemment à l'origine de grosses opérations immobilières dans l'entreposage havrais (notamment au profit du groupe Panhard https://www.panhardgroupe.com/ )
Ce développement de la logistique immobilière dans l'amont immédiat du grand port maritime du Havre revêt une importance stratégique majeure pour la Normandie mais aussi pour la France car il s'agit de promouvoir une logistique plus efficace, plus performante et donc plus respectueuse de l'environnement en rationnalisant les transports notamment routiers mais il s'agit aussi d'affirmer la souveraineté logistique de notre pays:
Il faut bien dire que jusqu'à récemment (on dira merci au Covid 19) l'idée de souveraineté logistique pouvait paraître loufoque à nombre de décideurs publics et privés baignés jusqu'au cou dans l'idéologie d'une mondialisation libérale bienheureuse: ce n'est plus le cas désormais tant l'actuelle crise sanitaire et économique a montré parfois cruellement l'importance d'assurer la sécurité de nos approvisionnements. La logistique et sa maîtrise sont donc stratégiques et vont l'être encore plus lorsque la superpuissance industrielle et commerciale chinoise relancera son projet des nouvelles routes de la soie qui consiste, concrètement, à prendre le contrôle des infrastructures logistiques disponibles ou d'en créer de nouvelles: les magnats de l'immobilier chinois ayant les moyens financiers que nous savons, il est donc urgent de mettre en oeuvre des outils, des méthodes, des projets, des financements pour construire une souveraineté logistique au Havre, en Normandie qui fait défaut à la France.
On lira avec intérêt cette étude de l'agence d'urbanisme de la région du Havre qui s'intéresse enfin à la question de la logistique sous l'angle immobilier:
La communauté urbaine Le Havre Seine Métropole compte 2 millions de m2 de surface d’entreposage, répartis sur près de 300 locaux.
L’AURH a évalué la part d’entreposage logistique dans cet ensemble.
Plus de 80 % des entrepôts sont dédiés à l’activité logistique
Dans la communauté urbaine Le Havre Seine Métropole, les entrepôts logistiques représentent plus de 80 % du parc d’entrepôts, en termes de surfaces. On dénombre 141 entrepôts logistiques pour un peu plus de 1 675 000 m² dédiés.
La moitié de ces entrepôts (875 000 m²) sont des entrepôts classe A, dits « de haute fonctionnalité » (classification CELOG – voir méthodologie). La part de ces entrepôts est en progression : la zone logistique de port 2000, les parcs logistiques de Normandie et le parc du Hode se sont vues accueillir ces dernières années des entrepôts de grandes tailles, c’est-à-dire supérieur à 40 000 m².
Les entrepôts à petite hauteur sous plafond et dont les espaces de manœuvres sont restreints (classe B et classe C) représentent un quart des surfaces.
Répartition du parc d'entrepôts par vocation
Un marché dynamique
Les transactions d’entrepôts ont battu des records en 2018 et 2019 (plus de 115 000 m2 négociés). Il faut remonter à 2012 pour retrouver des chiffres équivalents.
- Transactions en 2019 : 115 240 m² placés (dont 57 530 m² placés dans le neuf)
- Offre disponible au 31/12/2019 : 200 900 m² disponibles (dont 39 390 m² neufs disponibles)
- Construction livrée au cours l’année 2019 : 79 120 m² surface de plancher
Une activité logistique concentrée dans la zone industrialo-portuaire, une répartition plus éparse pour le reste du parc d’entreposage
Pour en savoir plus sur le marché de l’immobilier d’entreprise
Pour en savoir plus sur le marché de l’immobilier d’entreprise dans la région havraise, consultez le bulletin de l’observatoire de l’immobilier d’entreprise + (le marché 2019 sera étudié dans le bulletin à paraître début octobre 2020).
Vous découvrirez les derniers chiffres et les dernières analyses du marché des entrepôts, du marché des bureaux et du marché des bâtiments industriels et ateliers.
La méthodologie du recensement
En l’absence de données ouvertes suffisamment précises concernant la répartition des surfaces d’entreposages, l’AURH a décidé de recenser les surfaces d’entreposage selon sa propre méthodologie en 2019.
Seules les surfaces supérieures ou égale à 500 m² ont été recensées et comptabilisées, les surfaces inférieures étant souvent couplées à une activité artisanale, et appartenant donc à la catégorie des ateliers de l’observatoire.
Pour réaliser cette étude, l’AURH a analysé les programmes et offres immobilières, épluché la presse, rencontré les acteurs du marché tel que Haropa – Port du Havre, et a réalisé un travail de terrain et de photo-interprétation. L’ensemble des informations recensées ont été saisies et retranscrites sous forme de données géographiques puis présentées pour la première fois aux partenaires de l’observatoire de l’immobilier d’entreprise en juillet 2019. La base étant validée, elle est régulièrement alimentée et mise à jour pour assurer la viabilité des données.
Afin de tenir compte de l’ensemble des surfaces d’entreposage existantes, l’AURH a défini sa propre classification selon la vocation principale des surfaces d’entreposages :
- Entrepôt à vocation logistique : plateforme intermédiaire entre les producteurs et les distributeurs. L’entrepôt stock les produits finis et toutes autres marchandises, et bien souvent assure la manutention de ces derniers ;
- Entrepôt à vocation commerciale : surfaces d’entreposage des distributeurs, qui stockent ses produits finis et ses marchandises avant leur mise en rayon pour la vente ou la location de ces derniers.
- Entrepôt à vocation d’entreprise : surfaces d’entreposage détenues par les producteurs au sein du lieu de production dans lesquels sont stockés les matières premières et/ou produit semi-fini avant leur transformation ;
- Entrepôt à vocation autre : surfaces d’entreposage destinées à la formation des métiers de la manutention, aux activités de stockage divers pour les particuliers, ou bien n’étant actuellement inoccupées.
Concernant les entrepôts logistiques, l’AURH s’est appuyée sur la classification dite CELOG proposée par l’ORIE (observatoire régional de l’immobilier d’entreprise d’Île-de-France). Cette classification vise à distinguer les locaux d’entreposages en trois classes (A, B, C) selon les caractéristiques bâtis et opérationnelles du site.
Voir aussi cette annonce, concernant le développement logistique du port du Havre: