L'éclatante renaissance du camembert à... Camembert!
Preuve supplémentaire que la réunification de la Normandie est une dynamique positive:
L'éclatante renaissance du camembert à Camembert avec des projets de fromageries respectant scrupuleusement le cahier des charges du vrai camembert de Normandie AOC. C'est une réponse plus que symbolique apportée à la position absurde du géant Lactalis.
Mais ces initiatives heureuses et courageuses seraient encore plus encouragées si elles pouvaient aussi s'appuyer sur une AOC Lait de Normandie.
Une fromagerie, le Clos de Beaumoncel, va ouvrir en juillet à Camembert (Orne). La commune de 187 habitants devrait bientôt compter quatre fromageries... Après avoir craint leur disparition en 2014.
Le bâtiment à colombages de 900 mètres carrés s’est niché en contrebas du manoir de Beaumoncel où, en 1792, un prêtre réfractaire et une fermière augeronne, Marie Harel, s’associaient pour fabriquer le premier camembert. « Notre fromagerie doit démarrer en juillet après un an de travaux » , annonce Xavier Cassigneul.
L’ingénieur agronome et ancien cadre de Graindorge à Saint-Loup-de-Fribois (Calvados) où il dirigea la fromagerie, participe à la relance de la production de camemberts dans son berceau historique. En 2014, Camembert a craint de voir disparaître sa dernière fromagerie, faute de repreneur. Sept ans plus tard, la commune ornaise aux 187 habitants et… 300 vaches laitières, se réjouit de compter bientôt quatre ateliers de production dont le dernier mené par le créateur de la Laiterie de Paris, Pierre Coulon, crémier dans le 18e arrondissement de Paris. « La bagarre autour de l’appellation d’origine protégée (AOP) a réveillé les esprits » , dit en souriant Michel Cousin, le maire de Camembert.
Le camembert de Normandie, au lait cru, moulé manuellement à la louche (cinq louches à une heure d’intervalle) règne ici en maître. Le « Clos de Beaumoncel » s’inscrit dans cette tradition. « Avec quatre salariés, on part sur une production journalière de 1 000 camemberts AOP et fermiers » , détaille Xavier Cassigneul qui a investi un million d’euros dans ce projet mené avec Lactalis (la Fromagerie de Normandie), le propriétaire du bâtiment. « Les premiers tests de fabrication seront effectués à partir de la mi-mai à Saint-Loup-de-Fribois, dans la fromagerie Graindorge (groupe Lactalis). »
Environ 2 500 litres de lait par jour
Les fromages seront fabriqués à partir du lait de la ferme de Vimer (Earl Trèfle d’Auge), à Guerquesalles, une commune voisine. Stéphanie François, ingénieure agronome de formation, y conduit avec deux salariés le troupeau de 120 vaches laitières. « Avec Stéphanie, nous avons repris l’exploitation agricole en 2018, indique Xavier. Le lait sera certifié bio en 2022. » Les animaux reçoivent une ration essentiellement herbagère et pâturent huit mois de l’année.
La ferme laitière dispose de 200 ha dont 90 ha de pâturage autour des bâtiments d’élevage. « Environ 2 500 litres seront apportés tous les matins à la fromagerie. » Riche de sa flore native, ce lait laisse espérer « un camembert qualitatif ». Le marché du camembert « haut de gamme » est aujourd’hui le seul à voir ses ventes progresser.
Mais c’est un fromage difficile à produire. « Entre les deux guerres, les paysans de Camembert fabriquaient du fromage blanc, du beurre. Du pont-l’évêque ou du livarot aussi car moins compliqués à produire que le camembert , raconte Michel Cousin. Toutes ces productions partaient ensuite vers Paris par le train de Lisieux. »
L’histoire associe pourtant la commune au roi des fromages. Un véritable atout. Entre 13 000 et 15 000 visiteurs passent, chaque année, la porte du musée du camembert, situé à quelques pas de la fromagerie de Xavier Cassigneul et Stéphanie François. « Nous avons prévu un couloir vitré de 120 mètres pour permettre d’assister à la production de nos camemberts. » La dégustation fait aussi partie du programme.