Rouen, 19 juillet 2021: première assemblée régionale plénière de la nouvelle mandature normande.
Lundi 19 juillet 2021, dans le cadre spartiate d'un amphithéâtre du technopôle du Madrillet près de Rouen, se réunissait pour sa première assemblée plénière exécutive depuis les dernières élections régionales, le conseil régional de Normandie présidé par Hervé Morin parti pour l'aventure d'un second mandat normand de six ans qui sera aussi son dernier: l'objectif sera de consolider l'acquis de la réunification et de travailler enfin à la résolution de quelques faiblesses structurelles héritées de plus de cinquante années de division normande...
Hervé Morin en a ciblé deux:
1) Le retard de la Normandie en matière de couverture médicale notamment concernant certaines spécialités (par ex: l'orthodontie) et le maintien d'un réseau médical et de santé de qualité sur l'ensemble d'un territoire régional notamment rural qui redevient attractif pour accueillir de nouvelles populations désireuses de fuir la région parisienne.
2) Le retard de la Normandie en matière de formation supérieure et de formation professionnelle afin de donner, enfin, un avenir à la jeunesse normande alors que nous subissons une fuite des jeunes bacheliers normands (les meilleurs s'en vont), une difficulté des entreprises régionales à recruter des jeunes bien formés et dont la formation correspond aux emplois proposés et, last but not least, un ralentissement inquiétant de la natalité normande.
On lira ci-après les deux comptes rendus proposés par la journaliste de Ouest-France à l'occasion de cette première séance de travail de la seconde mandature de l'unité normande:
Les conseillers régionaux de Normandie étaient réunis en assemblée plénière lundi 19 juillet 2021 à Saint-Étienne-du-Rouvray, près de Rouen (Seine-Maritime). Marqués par l’abstention record du dernier scrutin, ils veulent changer des choses.
Le 18 octobre à Caen, le 16 décembre à Rouen : ce sont les dates des prochaines assemblées plénières du conseil régional. Les conseillers régionaux, qui siégeaient lundi 19 juillet 2021dans l’amphithéâtre du campus du Madrillet, près de Rouen, ont bien noté. En cas d’absence non justifiée par un motif impérieux, ils seront sanctionnés financièrement. La présence est aussi obligatoire pour les commissions permanentes et réunions de travail.
Cette mesure, nouvelle, fait partie du règlement intérieur adopté par les élus à l’unanimité. L’abstention record des derniers scrutins n’a laissé personne indifférent. « Il est nécessaire de démontrer que nous sommes exemplaires, insiste Hervé Morin, le président de la Région Normandie. Et le pouvoir donné à un autre élu ne vaut pas présence. ». Les contrôles seront effectués en début et en fin de séance. En cas d’absence, les indemnités pourront être amputées de moitié.
« Des élus qui ne coûtent rien, ce serait encore trop cher »
Exemplarité toujours, avec des indemnités d’élus qui augmentent mais restent bien inférieures aux taux autorisés pour une Région cette strate. Un conseiller perçoit 2 333 € bruts par mois (60 % de l’indice utilisé, c’est 300 € de moins qu’en Bretagne, 120 € de moins qu’en Pays de la Loire), un vice-président, 3 267,03 € (270 € de moins qu’en Pays de la Loire). Hervé Morin touche 4 000 € par mois et n’atteint pas le plafond autorisé non plus. « Ce serait démago de critiquer cette hausse dans la Région où les indemnités sont les plus raisonnables », reconnaît Nicolas Bay, chef de file du Rassemblement national. Le sujet est sensible. « Très franchement, pour gérer une collectivité avec un tel budget et plus de 5 000 collaborateurs, ce n’est pas volé, souligne Hervé Morin. Mais des élus qui ne coûtent rien, aux yeux des gens, ce serait encore trop cher… »
La majorité des Français n’est pas allée voter. La situation appelle les élus à « faire preuve d’humilité ». Mélanie Boulanger, présidente du groupe socialiste, et Nicolas Bay, font le même vœu.
La socialiste se demande quand même « ce qu’un citoyen normand pourrait bien penser de nous, occupés à débattre de notre intendance alors que nous nous trouvons au confluent de plusieurs crises majeures […] Où est le plan de relance dont la Normandie a tant besoin ? Où sont les amorces de réponse à la crise démocratique ? Certainement pas dans le conseil régional des jeunes, qui est loin de représenter toutes les jeunesses. »
Derrière les mots
Dans un amendement, « en réponse à l’effrayante abstention », Nicolas Bay propose que 30 000 signatures permettent aux habitants de faire inscrire un sujet à l’ordre du jour des réunions de conseil. Son « mécanisme de démocratie directe » est rejeté.
Ce que veulent les Normands ? Il ne faut pas les oublier. C’est ce qu’a rappelé Hervé Morin quand, dans la journée, pro et anti-voitures se sont écharpés sur l’intérêt à attaquer le chantier routier de la nationale 12, un sujet vieux de soixante ans dans l’Orne. « Je vous rappelle que nous sommes là pour soutenir les projets qui sont fortement souhaités par nos habitants. Vous voulez qu’on fasse voter les Ornais ? Ils seraient pour à 80 % ! Il y a la théorie et il y a des fondamentaux. »
Difficile de faire vivre la démocratie ? Les sentiments étaient partagés à la fin de la journée. L’écologiste Bastien Récher, privé de la présidence de la commission des finances jusque-là attribuée à la gauche, regrettait « le traitement réservé aux oppositions. On nous enlève un moyen de contrôle. Le mandat va être sportif ». « On nous prive aussi de temps d’expression. Le ton est donné », lâchait une socialiste.
L’abstention n’a laissé personne indifférent. Derrière les mots, les élus sauront-ils inverser la tendance ?
Les conseillers régionaux sont réunis ce lundi 19 juillet 2021, à Saint-Étienne-du-Rouvray près de Rouen (Seine-Maritime). Après la séance d’installation le 2 juillet à Caen (Calvados), majorité et oppositions ont présenté le sens qu’elles souhaitent donner à leur action pendant ce mandat.
Quinze jours après la séance d’installation, le 2 juillet 2021, les conseillers régionaux ont pris place dans l’amphithéâtre du campus du Madrillet, à Saint-Étienne-du-Rouvray (Seine-Maritime). Comme celui de la fac de Caen, il permet aux élus de siéger dans le respect des mesures sanitaires. Le précédent mandat s’est achevé dans un contexte de crise. Le nouveau commence avec.
Un « effort sans précédent » en matière de santé
C’est le premier sujet abordé par Hervé Morin, le président les Centristes, qui entame son deuxième mandat. Il va présenter dans la journée le schéma régional en matière de santé, « un effort sans précédent » de 200 millions d’euros sur le mandat « quand l’État investira une somme de 255 millions d’euros, hors chantier de reconstruction du CHU de Caen, dans le cadre du Ségur de la santé sur les dix prochaines années ».
Mais, insiste Hervé Morin, « cet effort ne sera effectué que si nous co-construisons ce projet. En aucun cas, la Région ne se transformera en guichet pour réduire l’effort budgétaire de l’État ».
Ses sujets suivants sont les routes – la Région veut prendre la main sur le chantier de la nationale 12 entre l’Orne et Paris avec le Département – et l’économie. Le président veut porter le fonds Normandie participations, qui permet d’entrer au capital d’entreprises, de 72 à 100 millions d’euros.
Dans la continuité du premier mandat, Hervé Morin s’engage à « augmenter encore sensiblement les investissements en 2022 », tout en continuant de « faire baisser les dépenses ».
L’abstention record des derniers scrutins s’accompagne de prises de conscience. « Il est nécessaire de démontrer que nous sommes exemplaires », insiste Hervé Morin. Le nouveau règlement intérieur qui sera présenté au vote dans l’après-midi proposera un symbole de cette nouvelle exemplarité souhaitée : l’absence des élus aux réunions sans motif impérieux pourra entraîner une sanction, la baisse des indemnités jusqu’à 50 %.
Normandie écologie appelle à « plus de responsabilité »
Les écologistes sont passés de 3 à 11 dans l’hémicycle régional. Plus nombreux que les socialistes (9), avec qui ils avaient fusionné avant le premier tour, ils ont repris leur indépendance d’expression en créant leur groupe. Et ont donné le ton, incisif, en s’exprimant sur tous les sujets : ils seront une opposition très présente.
Co-présidente du groupe avec le Caennais Rudy L’Orphelin, Laëtitia Sanchez appelle à « un mandat de la responsabilité. Notre capacité d’adaptation à la crise doit se doubler d’une capacité d’anticipation. Prévenir vaut toujours mieux que guérir. »
Elle regrette que la lutte contre le réchauffement climatique ne pèse « que quatre lignes dans le rapport d’activité de l’année 2020 ».
Le projet de produire de l’énergie à partir de la captation de carbone est « hypothétique », selon elle. Le groupe reproche à la majorité d’Hervé Morin de soutenir le nucléaire et de prévoir des investissements routiers, quand il faudrait « stopper l’artificialisation des sols. C’est la politique du en même temps : d’un côté, replantons des haies ; de l’autre, tondons-les. La meilleure énergie est celle que nous ne consommons pas ».
« Il y a matière à faire mieux », pour Mélanie Boulanger (PS)
La socialiste Mélanie Boulanger appelle à de l’« humilité, de la sobriété, de la proximité ». Elle se demande « ce qu’un citoyen normand pourrait bien penser [des élus], occupés à débattre de [leur] intendance alors que nous nous trouvons au confluent de plusieurs crises majeures. »
Démocratique, économique, sanitaire, écologique… « Sans considérer toutes ces urgences, la majorité trace son chemin, le même chemin. Où est le plan de relance dont la Normandie a tant besoin ? Où sont les amorces de réponse à la crise démocratique ? Certainement pas dans le conseil régional des jeunes, qui est loin de représenter toutes les jeunesses. Quelles réponses au désarroi des entreprises ? »
Pour elle, « l’ordre du jour ne traite pas ou peu de ces urgences. Quand je songe à ce qu’un citoyen normand pourrait penser de nos débats, je me dis qu’il trouverait sûrement qu’ils ne sont pas à la hauteur des urgences qui marquent leur quotidien. Je persiste à croire qu’il y a matière à faire beaucoup mieux. »
Après le « en même temps », le « à la fois » de Laurent Bonnaterre
Le groupe Normandie Terre d’avenir continue de jouer le consensus. Il jouera son rôle « avec sérieux et travail », « vigilant et constructif, insiste Laurent Bonnaterre. La période mérite plus d’unité, de rassemblement, de travail en commun et moins de divisions ».
D’ailleurs, celui qui était soutenu par l’ancien Premier ministre Edouard Philippe, appelle Hervé Morin à « des relations plus apaisées avec le gouvernement. Un président de Région ne peut pas être seulement commentateur de l’actualité politique nationale sur les chaînes d’info en continu, pour l’après-midi, utiliser pour le compte de sa propre communication les dispositifs que l’État déploie et finance. »
Pour autant, il salue l’action d’Hervé Morin sur l’économie ou le soutien aux territoires. Il demande davantage pour la jeunesse et l’amélioration de la mobilité : le train autant que la route, avec le contournement de Rouen et celui de Cherbourg. « Il ne faut pas opposer, comme certains le font trop souvent, les mobilités entre elles mais tisser beaucoup plus une modalité active et pratique, au quotidien pour nos concitoyens. On peut être à la fois pragmatique et ambitieux, sans démagogie. »
Nicolas Bay (RN) : « Nous serons déterminés et intransigeants »
L’abstention impose « l’humilité de tous ». Nicolas Bay, qui préside le groupe du Rassemblement national, entame le mandat « dans un esprit constructif ». Son groupe s’installe en « opposition déterminée et intransigeante » et annonce qu’il soutiendra les décisions « qui iront dans le bon sens ».
Ce sera le cas sur le nucléaire et le plan hydrogène. Sur les investissements sur les routes, dans les ports et le ferroviaire également, « des infrastructures centrales pour l’attractivité économique et touristique ». Mais sur le train, « cinq ans et demi après la régionalisation, force est de constater que la situation n’est pas bonne du tout. Nous sommes sortis du Moyen-âge avec des trains tous neufs mais sur des rails du XIXe siècle », poursuit-il
Il attend aussi de la Région un soutien fort « aux petites entreprises qui n’ont pas les moyens d’aller chercher les aides, y compris quand elles y ont droit ».
« Responsables, nous le serons », promet David Margueritte
« Le chemin tracé est le bon et bénéficie d’une confiance et d’une légitimité nouvelles, répond David Margueritte, au nom de la majorité régionale. Responsable, notre majorité le sera avec une boussole : pousser les feux de l’investissement. » Il promet de la responsabilité « dans les grands projets, comme dans la vie quotidienne ».
La Région veut ainsi « permettre l’accès de tous les Normands à la fibre optique dans les quatre ans », offrir davantage d’égalité des chances entre les jeunes, veiller à l’équité entre les territoires. « Responsables, nous le serons », répète David Margueritte. Un engagement pour près de sept ans.
Commentaire de Florestan:
Que retenir de ce débat de politique général qui a lieu, comme de coutume, au début de chaque assemblée régionale?
Pas grand chose!
Si ce n'est la volonté de l'actuelle majorité régionale de travailler dans la réalité et non pas dans l'idéologie: que l'on songe à la question du désenclavement routier ou de la question du nucléaire. On notera que personne n'a parlé du dilemme éolien...
Autre évidence que les oppositions et parfois aussi la majorité régionale peinent à comprendre: la Normandie c'est bien plus que la réplication à une échelle territoriale inférieure du débat public national parisien.
La Normandie avec ses enjeux, ses défis, ses potentiels et son avenir existe en tant que telle!
Il serait tant que certains élu.e.s (soyons inclusifs !!!) du conseil régional finissent enfin par s'en apercevoir!