La SNCF condamnée à la peine "Capital" ; elle y survivra probablement… Mais dans quel Etat ?
En octobre dernier, sous la plume d’Etienne Girard, le magazine Marianne avait publié un article titré « Pendant que la SNCF touchait le fond, la ministre Florence Parly y gagnait 52 000 euros mensuels »
https://www.marianne.net/politique/pendant-que-la-sncf-touchait-le-fond-la-ministre-florence-parly-y-gagnait-52000-euros, commenté dans l’Etoile de Normandie sous le titre « Pendant que les NORMANDS galèrent dans les trains, on pantoufle GRASSEMENT dans les hautes sphères de la SNCF!»
A son tour, le magazine Capital taille un costume rapiécé à une institution jadis prestigieuse, dans son numéro de février titré « SNCF, ses bêtises qui nous coûtent cher »
voici l'article à lire ci-après en intégralité...
A chaque incident, le P-DG de la compagnie a une bonne raison à invoquer et sort un énième plan d'attaque. Mais, derrière l'affichage, un bilan médiocre.
De mémoire de régulateur, on n'avait jamais vu ça. « En avril 2016, nous avons demandé à la SNCF de nous fournir l'ensemble des données que la loi nous autorise à prélever », se souvient Nicolas Quinones-Gil, le directeur des études de l’Autorité de Régulation des Activités Ferroviaires Et Routières (Arafer). « Ces chiffres, comme l'évolution de la fréquentation et de la ponctualité, étaient exigibles sous deux mois. Or il a fallu plus d'un an pour tout obtenir. » De fait, le P-DG de Ia SNCF, Guillaume Pepy, n'a obtempéré qu'après avoir été convoqué par le gendarme des transports, fin 2016, et menacé de poursuites. Avec, à la clé, une amende allant jusqu'à 3% du chiffre d'affaires, voire - catastrophe ! - une interdiction provisoire de faire rouler les trains.
Si l'humble serviteur de l'Etat Pepy, comme il se définit lui-même, a fait preuve d'autant de mauvaise volonté, c'est que les indicateurs dévoilés par ce premier « bilan du transport ferroviaire français » étaient de nature à écorner sérieusement son image de marque. Le rail ne cesse, en effet, de perdre des parts de marché, faisant de la France, observe Nicolas Quinones-Gil, « le seul grand pays d'Europe où le train décroche par rapport à la voiture ». Sa fréquentation baisse, sauf pour les TGV et les Transilien, tandis que les retards et les annulations atteignent des niveaux préoccupants. Cette fois-ci, contrairement à son habitude, Guillaume Pepy n'a pas réussi à se dérober.
Ah! il n'a pas manqué de faire porter le chapeau à sa tutelle, l'Etat, en lui reprochant d'avoir favorisé le tout-TGV au détriment des trains du quotidien - TER, Intercités, RER - et de l'entretien des infrastructures. Y compris celui des systèmes informatiques qui font tourner les grandes gares du pays. En cela, il n'a d'ailleurs pas complètement tort. Mais l'excuse est un peu rapide. Car, depuis dlx ans, l'indéboulonnable patron s'est beaucoup dispersé, privilégiant l'accessoire, voire « le paraître », selon l'expression du délégué syndical cheminot Bernard Aubin (First), à l'essentiel. Pas assez de technique, trop de communication et de marketing ! Et ces gadgets qu'affectionne le P-DG finissent par nous coûter cher.
Guillaume Pepy, c'est d'abord le roi des annonces qui font pschitt. L’information voyageur est dans un état catastrophique ? Il embauche par centaines des « gilets rouges ». « Mais, en cas de pépin, ces derniers ne donnent jamais les bonnes infos », s'exaspèrent les associations d'usagers. Il lance, fin novembre, un concours de start-up destiné à aider ses équipes à mieux assister le public ? Patatras ! le mois suivant, les gares parisiennes étaient bloquées et des milliers de clients abandonnés à eux-mêmes. Il célèbre les nouveaux menus préparés par de grands chefs étoilés comme Michel Sarran à bord des TGV ? Ils sont, le plus souvent, en rupture de stock. Il vante son appli permettant de commander à l'avance au wagon-bar sans quitter son siège ? Elle fonctionne mal. Ce passager du Marseille-Paris qui avait acheté pour 35 euros de verrines sur son smartphone peut en témoigner. Comme elles n'étaient plus disponibles, le serveur du TGV, pardon, le « barista », les a remplacées, faute de les rembourser, par une poignée de Toblerone, quelques Twix et des bouteilles de Cristaline...
Guillaume Pepy est affirmatif : la SNCF, qui est financée à 42% par le contribuable, n'a pas augmenté ses prlx depuis deux ans, sens du service public oblige. C'est faux. Selon I'UFC-Que choisir, le prix au kilomètre du TGV est passé de 16 centimes par passager en 2015 à 17 centimes en 2017. Et les disparités sont fortes. Certes, la SNCF a développé son offre de grande vitesse low-cost Ouigo qui rencontre un succès indéniable. Certes, elle propose des tarifs attractifs à ceux qui peuvent acheter leurs tickets des mois à l'avance ou voyager pendant les heures creuses. « Mais elle a augmenté ses prix sur certaines lignes TGV comme Paris-Rennes ou Paris-Marseille », observe l'économiste spécialiste des transports Yves Crozet. « La facture explose les week-ends et en période de vacances scolaires, bref quand les familles se déplacent », regrette le président de la Fédération nationale des associations d'usagers des transports (Fnaut), Bruno Gazeau.
COMMUNICATI0N ENCORE lorsqu'il s'agit de la ponctualité. Guillaume Pepy l'a annoncé solennellement : il fait la guerre aux retards. Il rembourse même, depuis 2016, tous les clients à partir de trente minutes de dépassement. La réglementation européenne ne l'oblige pourtant à le faire qu'au bout d'une heure. S'il s'impose une telle contrainte, c'est certainement que les statistiques s'améliorent, imagine- t-on. Que nenni ! La ponctualité s'est dégradée ces derniers mois, au point que la direction avoue avoir dû rembourser 1,5 million de clients en 2017. Quel est le coût de la facture ? Là-dessus, le P-DG ne dit mot. II préfère enjoliver les statistiques. Un train est réputé en retard au bout de cinq minutes, explique ainsi la SNCF. « Cinq minutes et cinquante- neuf secondes », corrige-ton à l'Arafer. Les statisticiens du gendarme du ferroviaire reconnaissent d'ailleurs être tombés de l'armoire quand ils se sont aperçus que la SNCF grattait cinquante-neuf précieuses secondes. Un brin mesquin quand on sait que « la limite était à trois minutes dans les années 1990 », rappelle le syndicaliste Bernard Aubin.
Le patron du rail français semble loin de ces vétilles. Il se veut visionnaire : « Mon plus grand concurrent c'est Google. » Quand on évoque les problèmes du quotidien, il répond qu'il faut se projeter vers « les mobilités de demain ». C'est pourquoi il investit généreusement dans l'autopartage, le covoiturage, les VTC avec le rachat de LeCab, ou encore dans les cars Macron sous la marque Ouibus. « Toutes ces diversifications sont déficitaires », déplore pourtant l'économiste Yves Crozet, « mais l'Etat rechigne à y mettre le nez. » Et que penseront les dizaines de milliers d'usagers du RER B, régulièrement malmenés dans des rames vétustes, des 8 millions d'euros que Guillaume Pepy a misés récemment sur l'Hyperloop, le train du futur imaginé par le fondateur de Tesla, Elon Musk ? « C'est un projet nébuleux qui ne verra jamais le jour », estime Yves Crozet.
Comme pour conjurer les critiques qui montent, le bouillonnant P-DG passe une bonne partie de son temps à essayer de se mettre les élus dans la poche. Il les invite à de formidables fiestas. Par exemple, 6 millions d'euros dépensés en caviar d’Aquitaine, champagne et fanfare, pour inaugurer cet été la LGV Paris-Bordeaux. Il finance leurs projets culturels et sociaux via la Fondation SNCF dotée d'un budget annuel de 5 millions d'euros.
Et il les recase en cas de trou d'air. L’ancien président de la région Haute-Normandie Alain Le Vern, bombardé au poste de patron de la branche TER de novembre 2013 à août 2015, pourrait en témoigner.
MALGRÉ CE RÉSEAUTAGE, certains grands élus ne le ménagent plus. Comme Christian Estrosi, qui a entamé un bras de fer avec la SNCF en février 2017, alors qu'il régnait sur la région Provence-Alpes-Côte d'Azur. Il égrène les mauvais chiffres : « 20% des trains arrivaient en retard, 10% étaient annulés et la fraude atteignait plus de 18%, le tout pour un coût de plus de 1 million par jour. » Aujourd'hui, redevenu maire de Nice, il demande au gouvernement d'ouvrir le rail à la concurrence le plus rapidement possible. Et a laissé le dossier à son successeur à la tête de la région, Renaud Muselier. Mais les négociations traînent. Et aucune convention n'a encore été signée. Un retard de plus.
Guillaume Pepy est Président-Directeur Général depuis 2008: son mandat s’achèvera en 2020.
De grandes déclarations, peu de résultats :
Dans Capital en 2008 :
« Un jour, la SNCF vendra des billets dans les hypers. »
« Notre grand projet, qui verra le jour en 2009, c’est le train communicant. »
Dans le Financial Times en 2015 :
« Je ne suis pas passionné par les trains. »
Dans La Tribune en 2017 :
« Notre plus grand concurrent, c’est Google. »
Cela donne l'impression que Guillaume Pepy a trahi sa vocation de... camelot, qu'il parle de train communicant tout en étant incapable de garantir aux usagers les informations dont ils ont tant besoin depuis que la SNCF n'est plus capable d'assurer un service correct, qu'il a été recruté pour s'occuper de trains alors que c'est un domaine d'activité qui ne l'intéresse pas ?! Et qu'il a du mal à identifier qui sont ses vrais concurrents sur le coeur de métier de son entreprise !
On comprend mieux, ayant lu cela, comment la SNCF est parvenue dans le caniveau.
Maintenant, des constatations chiffrées :
« 42 % des usagers sont mécontents du rapport qualité/prix »
« La branche réseau est en sureffectif »
A titre de comparaison, il y a « en Allemagne 40 000 agents pour 40 000 km de voies » ; « en France, c’est 55 000 agents pour 28 000 km de voies »
Bien-sûr, Capital rappelle que l’âge de « départ à la retraite pour les conducteurs de trains est 52 ans et, pour le personnel non roulant, 57 ans »
Les syndicats de cheminots ont beau déclarer que ces derniers cotisent en proportion de cet avantage ; en réalité, c’est leur employeur qui cotise, donc l’usager ou le contribuable, et ça ne provoque pas pour autant un régime salarial minoré par rapport à celui des autres salariés français !
« La dette explose : en 2010, 44 Mds€ ; en 2015, 54,4 Mds€ ; en 2016, 62,5Mds€ »
Les français peuvent s’étonner du montant de certaines dépenses :
. 2,7 M€ pour un séminaire à Tanger ;
. 6 M€ pour la fête de lancement de la LGV Paris-Bordeaux ;
. 210 M€ par an en communication (en moyenne entre 2009 et 2011).
Ils peuvent aussi s’étonner du prix des billets
Exprimé en prix moyen sur 100 km constaté entre avril 2015 et avril 2016, cela donne :
. 17,50€ en France ;
. 15,90€ au Danemark ;
. 13,70€ en Allemagne ;
. 12,90€ en Espagne ;
. 12,20€ en Italie.
Oui, s’étonner, surtout quand on constate que la ponctualité n’est guère exemplaire :
Le taux de retard des « TGV » à 5 minutes près en 2016 a été :
. De 2% au Japon ;
. De 7,3% en Espagne ;
. De 19,7% en France !
Le taux de ponctualité annuel moyen à 5 minutes et 59 secondes près des Trains Express Régionaux a été :
. En 2014, de 91,97% ;
. En 2017, de 91,07%.
Celui des Intercités :
. En 2014, de 88,12% ;
. En 2017, de 83,89%.
Petite touche de fun :
La SNCF met à la disposition des usagers 16 « applis » au moins sur mobile… Certaines ne seraient-elles pas… inutiles ?
En guise de conclusion :
Selon Nicolas Quinones-Gil, directeur des études de l’Autorité de Régulation des Activités Ferroviaires Et Routières, « Le rail ne cesse de perdre des parts de marché, faisant de la France le seul grand pays d’Europe où le train décroche par rapport à la voiture. »
Dès lors, que penser de l'intérêt porté par la SNCF et son P.-DG à la Ligne Nouvelle Paris-Normandie et aux lignes ferroviaires normandes ?
Un collabo assigné aux affaires ferroviaires et portuaires