Les VIKINGS sont-ils passés par Evreux?
Les Vikings sont-ils passés par Evreux? Sur Paris-Normandie, le débat est lancé entre spécialistes... Certains affirment que les Scandinaves sont bien passés par Evreux, d'autres, au contraire sont plus dubitatifs. On ne tranchera pas la question ici même. En revanche, on notera une fois encore que les fêtes normandes organisées par la ville d'Evreux ne passent toujours pas par la Saint Michel, fête des Normands dont on vient de connaître une 6ème édition plutôt réussie en cette année 2018.
Une place de choix lors des Fêtes normandes, à l’hippodrome de Navarre, et même un projet de « parc de loisirs à thème, d’envergure nationale », annoncé pour 2022 par la Ville sur le petit guide imprimé à l’occasion de ces deux jours d’animations : pas de doute, les Vikings ont la cote à Évreux.
Pourtant, celle qui est aujourd’hui la capitale de l’Eure « est loin d’être la ville la plus représentative quand on parle de Vikings en Normandie », estime Jimmy Blin. Le président de l’association de reconstitution rouennaise Vegvísir, qui côtoiera d’autres compagnies ce week-end, a préparé des panneaux explicatifs à destination du public.
Pour résumer ses recherches, un « p’têt ben qu’oui, p’têt ben qu’non » bien normand serait approprié. Car quiconque se penche sur l’Histoire des Vikings en Normandie doit affronter quelques obstacles, parmi lesquels le manque de sources fiables : « Les hommes du Nord avaient une tradition orale. Ils n’ont pas laissé de traces écrites de leurs passages dans notre région. Qui écrivait ? Les moines attaqués. Leurs chroniques étaient parfois rédigées plusieurs années après et les faits pouvaient être déformés. On ne peut pas leur accorder un crédit à 100 % », explique Jimmy Blin. Les dates et les noms étaient-ils corrects ? Pas toujours certain... « L’archéologie nous renseigne mieux mais peu de choses ont été retrouvées. »
Leurs descendants ont construit Saint-Taurin
Mais le passionné l’affirme : les Scandinaves sont bien passés à Évreux. « La ville, peu développée à l’époque, a été plutôt épargnée par les invasions. Les Vikings visaient plutôt les très grosses agglomérations. On sait toutefois qu’en 858, peut-être même un peu avant, ils ont remonté l’Iton, alors navigable, après l’Eure et la Seine. Ils pillaient les églises et les monastères, qui abritaient des richesses et où les religieux ne se défendaient pas », détaille Jimmy Blin.
Les années qui ont suivi ont « sûrement vu plein de raids vikings mais nous n’en avons aucune certitude ». Jusqu’au passage de Rollon, un événement qui illustre la difficulté de dater précisément certains faits. Jimmy Blin le situe en 892. Dans sa Petite Histoire d’Évreux racontée à mes élèves, Solange Krnel, ancienne institutrice et administratrice de la Société libre de l’Eure, mentionne : « La ville est incendiée en 886. »
Pierre Bauduin, de l’université de Caen (14), est moins catégorique : « D’après Dudon de Saint-Quentin, qui a écrit une Histoire des Normands aux alentours de l’an 1000, l’évêque Sebar a échappé à Rollon lorsque le chef normand a pillé Évreux. L’auteur précise qu’il a quitté son campement dans la région parisienne pour cette attaque. Un détail qui a conduit les historiens à relier l’événement au siège de Paris en 885-886. D’autres sources placent cette attaque en 893 ou en 898 », développe le médiéviste, spécialisé dans l’étude des mondes normands.
Une chose est sûre, le traité de Saint-Clair-sur-Epte, signé en 911 par Rollon et Charles III le Simple, roi des Francs, « a contribué au développement d’Évreux », affirme Jimmy Blin. Pour rappel, il a donné naissance au duché de Normandie, un territoire correspondant peu ou prou à l’ancienne Haute-Normandie, à laquelle on peut ajouter le pays d’Auge. « En échange, Rollon s’est engagé à repousser les invasions barbares, à défendre le royaume et à se faire baptiser », résume Jimmy Blin.
Selon lui, la capitale euroise « peut remercier les descendants des Vikings, devenus les Normands. Richard Ier, petit-fils de Rollon, a par exemple construit l’église Saint-Taurin et Robert le Danois, archevêque de Rouen et comte d’Évreux, a fait fortifier la ville. » Une défense « digne d’un chef de guerre, faite de buttes surélevées et de palissades de bois », dont il ne reste plus rien aujourd’hui.
Seules « traces » de ce passé : « La rue Isambard, qui s’appelait autrefois rue du Homme, ce qui signifie ‘‘prairie au bord de l’eau’’, ‘‘îlot’’. Elle se trouve justement entre différents bras de l’Iton. On peut aussi citer la Côte blanche, White Clive jusqu’au XIIIe siècle, ce qui vient de ‘‘hvit’’, vignoble, et ‘‘kliff’’, falaise. » Autant d’anecdotes que le passionné partagera avec le public, ce week-end.
Infos pratiques
Jimmy Blin animera deux conférences sur les « Traces vikings en Normandie, toponymes et patronymes », samedi 6 et dimanche 7 octobre 2018, à 16 h, sous le chapiteau L’épopée viking.
à retrouver sur www.evreux.fr